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Les 10 meilleurs romans éco de l’été

9 min
La sélection de romans d'Alter Eco. PHOTO : Greygouar

L’été, c’est fait pour s’évader. Quoi de mieux qu’une bonne fiction pour se détendre entre deux brasses ou après une bonne randonnée ? Alter Eco vous propose une sélection de 10 histoires passionnantes à dévorer sans modération...

L’été, c’est fait pour s’évader. Quoi de mieux qu’une bonne fiction pour se détendre entre deux brasses ou après une bonne randonnée ? Alter Eco vous propose une sélection de 10 histoires passionnantes à dévorer sans modération.

1/ L’homme derrière la tour

Gustave Eiffel n’est pas l’inventeur de la tour qui porte son nom ! Il a racheté le brevet à deux de ses ingénieurs qui en ont eu l’idée et ont apporté les solutions techniques permettant de faire tenir ces tonnes de fer – et ce n’est pas la seule fois qu’il a eu recours à ce genre de pratique. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir été l’un des plus grands inventeurs et entrepreneurs français du XIXe siècle, à la tête d’une véritable multinationale.

Christine Kerdellant raconte de manière plaisante la vie personnelle et de chef d’entreprise de ce constructeur de l’extrême, de sa contribution à la statue de la Liberté à ses ponts portatifs qui font fureur. On suit son presque mariage – la future belle-famille annule au dernier moment – et on découvre comment il retrouve bien plus tard l’amour de sa vie.

Plusieurs chapitres sont bien sûr consacrés à la tour, mais Eiffel a été bien plus que cela, il finit d’ailleurs sa vie en travaillant de manière efficace et originale sur l’industrie naissante de l’aéronautique. Fils d’une mère cheffe d’entreprise, il resta un entrepreneur toute sa vie, exigeant, autoritaire et rencontrant le succès, devenant l’une des premières fortunes de France. Il fit quand même une énorme erreur en s’engageant dans l’affaire du canal de Panama, ce qui lui valu une condamnation à deux ans de prison pour abus de confiance – il n’y resta qu’une semaine. Une biographie romancée, plaisante et passionnante.

Christian Chavagneux

La vraie vie de Gustave Eiffel, par Christine Kerdellant, éd. Robert Laffont, 2021, 494 p., 21 euros

2/ Les humains contre les bactéries

La pandémie que nous vivons est loin d’être la première de l’histoire. Elle fera sûrement l’objet de futurs romans, comme l’épidémie de choléra qui a frappé Alexandrie à la fin du XIXe siècle sert de trame à celui-ci.

Hier comme aujourd’hui, les routes de la maladie suivent celles du commerce international. Et quand l’épidémie frappe, les voyages s’arrêtent, les hôtels et restaurants sont les premiers touchés, on demande aux gens de se laver régulièrement les mains, etc., Ce livre publié en anglais en 2006 résonne fortement à nos oreilles contemporaines. Mais le monde a changé. A la fin du XIXe siècle, on pense que la maladie a été inventée par les riches pour empoisonner les pauvres.

La concurrence entre les chercheurs – l’équipe que Pasteur a envoyé et dont on suit les membres d’un côté, le médecin allemand Robert Koch de l’autre – est bien présente et s’appuie sur des faits véritables. Mais, contrairement à aujourd’hui, ils se battent avec des moyens dérisoires. On ne dévoilera pas qui des Français et de l’Allemand identifiera le virus du choléra mais, nous sommes bien placés pour le savoir, « cette guerre sans fin entre l’homme et les bactéries n’est jamais entièrement gagnée, ni par un camp, ni par l’autre »

Ch. Ch.

Les eaux de la colère, par Anne Rolphe, Les éditions du sonneur, 2021, 468 p., 22 euros

3/ Keynes, saison 2

Après avoir fait évoluer John Maynard Keynes dans l’univers intellectuel de Bloomsbury dans le premier tome, Jean-Marc Siroën nous plonge dans l’ambiance intellectuelle de Cambridge où il enseignait. Une ambiance politique très marquée intellectuellement par le modèle soviétique, ce qui conduit plusieurs jeunes étudiants brillants – les fameux Philby, Burgess, Blunt, etc. – à trahir leur pays en devenant des taupes soviétiques, des étudiants que Keynes connaissait tous (ils se sont demandés s’ils ne devaient pas tenter de le recruter…). Le communisme était alors considéré comme le meilleur rempart à la fois contre le fascisme et les dérives du capitalisme évident dans les années 1930.

La fin du livre perd largement Keynes pour se concentrer sur les espions britanniques. Mais on a auparavant retrouvé les relations entre Keynes et le président Roosevelt. Et on comprend combien le grand économiste était déjà très malade à l’époque. Ce qui ne l’empêcha pas d’accepter de rejoindre le Trésor britannique pour la conférence de Bretton Woods : ce sera l’objet du troisième et dernier volume.

Ch. Ch.

Mr Keynes et les extravagants – Cambridge la rouge (tome 2), Par Jean-Marc Siroën, éd. Librinova, 2021, 300 p., 17,90 euros

4/ Polar climatique

Ceux qui travaillent sur les questions climatiques connaissent les livres sérieux de l’auteur sur le sujet du réchauffement climatique. Ils seront surpris de découvrir un auteur de roman entre polar et espionnage !

Un chercheur français est retrouvé mort sur son bateau. Ses découvertes permettraient de mettre en place un bouclier de miroirs autour de la terre pour empêcher les rayons du soleil de trop la frapper pour contribuer à lutter contre le réchauffement climatique. Cette « solution » technologique sert de trame au roman, car nombreux sont ceux qui souhaitent mettre la main dessus.

Mais, c’est juste une toile de fond dans un livre qui ne tente pas d’expliquer des idées par l’intermédiaire d’une fiction. Christian de Perthuis s’est vraiment pris au jeu d’écrire une aventure romanesque et si le prix Nobel de littérature est encore loin, on passe vraiment un moment plaisant avec son jeune policier de héros !

Ch. Ch.

Ils voulaient refroidir la terre, par Christian de Perthuis, éd. Librinova, 2021, 238 p., 14,90 euros

5/ La folie de la dépense

Si vous voulez passer un bon moment et plutôt drôle, ce petit roman épistolaire devrait faire l’affaire. L’héroïne ne peut s’empêcher de dépenser, elle est percluse de dettes et vit dans l’angoisse et l’obsession du créancier. Un émule de Freud lui diagnostique un « complexe de l’argent » dû au fait que, lorsqu’elle était jeune, elle n’en manquait pas ! La voici donc traité dans un institut spécialisé où elle doit simuler la maladie, son seul intérêt portant sur un potentiel héritage à venir. Elle se retrouve dans un petit groupe composé partiellement d’affairistes, reprochant à l’un d’entre eux d’être trop correct avec les autres en affaires, ce qui explique ses échecs ! L’héritage finira par arriver et on ne dévoilera pas comment, cette fois, c’est elle qui se retrouve en position de créancière.

Ch. Ch.

Le complexe de l’argent, par Franziska Zu Reventlow, éd. Allia, 2021, 124 p., 9,50 euros

6/ Un bel escroc

Un beau roman polyphonique et subtil sur les coulisses d’un scandale très inspiré de l’affaire Madoff. Jonathan Alkaitis est un financier courtisé par ses multiples investisseurs, jusqu’au jour où l’on découvre qu’il n’a fait qu’alimenter une gigantesque pyramide de Ponzi.

Sa femme était barmaid quand il l’a rencontrée dans l’une de ses propriétés, un magnifique hôtel de luxe dans un coin isolé. Leur relation est un arrangement financier comme un autre et elle ne savait pas précisément que son mari utilisait l’argent des nouveaux investisseurs pour payer les anciens.

Mais est-ce que ses employés, eux, étaient au courant ? Au cœur du livre, on entend aussi leur voix. Après la condamnation d’Alkaitis, ils se demandent comment ils ont pu ainsi pendant de longues années faire comme s’ils ne savaient pas. Autre point de vue, celui d’Olivia, l’une des victimes de l’escroquerie, désormais ruinée. Le livre se déploie dans l’intimité des personnages, tous hantés par leurs propres fantômes.

Naïri Nahapétian

L’hôtel de verre, par Emily St. John Mandel, Coll. Rivages Noir, éd. Rivages, 2021, 400 p., 22 euros

7/ Après la prison mexicaine

Aurelio Blanco sort de prison après quinze ans d’incarcération. Il redécouvre le Mexique. Et « dans ce futur où il arrivait, […] il n’y avait ni aliens, ni robots […]. Juste des publicités tape-à-l’œil, des viaducs à deux étages et des tours. Et bien sûr, des grues. Par dizaines. »

L’affaire qui l’a menée en prison est une escroquerie fondée sur une opération immobilière. Celle d’Olinka, un complexe de luxe construit suite à l’appropriation de terrains publics, qui couvre en réalité du blanchiment d’argent à grande échelle. A l’origine, Olinka devait pourtant être une sorte d’utopie, « une ville où les artistes, les scientifiques et les penseurs jouiraient d’une liberté absolue ». Mais la réalité mexicaine pervertit les utopies.

Aurelio Blanco, qui n’a fait que servir de bouc émissaire, réussira-t-il à récupérer son foyer, sa femme, sa fille ? C’est sur ce fil que se déploie le suspense de ce beau roman à l’écriture dense et fleurie, à la croisée de Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez et de La Griffe du chien de Don Winslow.

N.N.

Olinka, par Antonio Ortuno, éd. Christian Bourgois, 2021, 304 p., 18,80 euros

8/ Répression

Octobre 1960, Félix Moumié, chef de l’Union des populations du Cameroun (UPC), un parti anticolonialiste, est assassiné à Genève. Deux ans après, le journaliste Luc Blanchard enquête sur ce meurtre et découvre l’existence de la Main rouge, un groupuscule qu’il soupçonne d’être un faux-nez des services secrets français. Il se rend à Yaoundé et devient la cible du gouvernement camerounais et de ses « conseillers de l’ombre ». Parallèlement, son ami Antoine Lucchesi, officiellement restaurateur, se rend également au Cameroun. Il se trouve que son commis de cuisine a par erreur emporté avec lui dans ce pays le livre de compte qu’il tient pour la pègre marseillaise…

Tous deux découvriront la répression insoutenable que subissent les militants de l’UPC. Et plongeront dans les arcanes de la Françafrique. Un bon polar qui à travers la fiction fait vivre des personnages réels comme Félix Moumié et Jacques Foccart, homme d’affaires et pilier de la Françafrique.

N.N.

Frakas, par Thomas Cantaloube, Coll. Série Noire, éd. Galimmard, 2021, 432 p., 19 euros

9/ Ubérisés

Abel, étudiant, devient coursier à vélo pour une plate-forme de livraison de repas à domicile. Petit à petit, son corps se transforme, sa vie se transforme, au fur et mesure qu’aliéné par ce travail, il est happé par les courses rythmées par l’application électronique. Il croise notamment Lena qui répare les vélos abîmés pour aider ceux qui sont précarisés par l’ubérisation. Un roman qui nous plonge dans le quotidien de ce nouveau prolétariat avant de culminer dans leur révolte.

N.N.

Tous complices !, par Thomas Marchisio, Coll. Equinox, éd. Les Arènes, 2021, 304 p., 20 euros

10/ Difficile accueil

Après un orage, des migrants font naufrage sur une île en mer Egée. Ils sont plus de 300, soit autant que le nombre habituel des habitants de l’île. Comment les accueillir, comment prendre soin d’eux ? L’arrivée des rescapés exacerbe les tensions entre les habitants, partagés entre la générosité, la peur, la méfiance et le découragement. Ce roman polyphonique, souvent dramatique, parfois drôle, multiplie les points de vue pour aborder la question des migrants en Méditerranée.

N.N.

Point de passage, par Konstantinos Tzamiotis, éd. Actes Sud, 2021, 224 p., 18,80 euros

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