Opinion

Vous aviez dit : " régime à deux vitesses " ?

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Jacques Freyssinet Economiste, président du conseil scientifique du Centre d'études de l'emploi

On se souvient du tollé qu’avait soulevé, en juin 2000, la première version de la convention d’indemnisation du chômage créant le Pare. Celui-ci allait créer un régime à deux vitesses, en réservant les nouvelles prestations aux seuls bénéficiaires de l’assurance chômage. Cet enjeu a, semble-t-il, été ignoré à l’occasion de la signature, par toutes les organisations syndicales représentatives (sauf la CGT), de l’accord créant la convention de reclassement personnalisé.

Les salariés qui perdent leur emploi pour cause économique relèvent aujourd’hui de multiples régimes juridiques. Dans les entreprises d’au moins 50 salariés qui procèdent à un licenciement économique d’au moins 10 salariés sur le mois, un " plan de sauvegarde de l’emploi " doit être élaboré. Ce plan contient, notamment, " un ensemble de mesures destinées à favoriser le reclassement des salariés ". Les entreprises d’au moins 1 000 salariés doivent proposer un congé de reclassement d’une durée de quatre à neuf mois. Désormais, les entreprises de moins de 1 000 salariés devront proposer une convention de reclassement personnalisé, d’une durée maximale de huit mois, aux salariés ayant au moins deux ans d’ancienneté. S’ils n’ont pas ces deux ans d’ancienneté mais au moins six mois, les salariés pourront bénéficier des prestations d’accompagnement, mais ne recevront que l’allocation normale de l’Unedic. Si leur entreprise répond à certaines conditions et si elle signe une convention avec l’Etat, certains salariés peuvent, en outre, bénéficier de cellules de reclassement ou encore de conventions de formation ou d’adaptation du Fonds national de l’emploi, avec maintien provisoire du contrat de travail. Enfin, n’oublions pas que Jean-Louis Borloo a confirmé sa volonté d’expérimenter, dans certains bassins d’emploi en difficulté, les contrats intermédiaires (proposés par la mission Sabeg), devenus contrats de transition professionnelle.

Ainsi, les inégalités entre salariés, en cas de licenciement économique, s’amplifient-elles selon la nature du contrat de travail, l’ancienneté, la taille de l’entreprise, le bassin d’emploi, le nombre de licenciements... Les fins de contrat à durée déterminée (CDD) et de mission d’intérim ne donnent toujours droit à rien, hormis l’indemnité de précarité. Alors que tous les rapports récents ont dénoncé l’extrême segmentation des statuts des salariés en France, il est impressionnant de voir le processus se poursuivre obstinément.

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