Opinion

Intermittents : une alternative face à la précarité

2 min
Pierre Concialdi chercheur à l'Institut de recherches économiques et sociales (Ires)

Le lendemain de la déclaration de politique générale du Premier ministre au Parlement, un rapport proposant un nouveau modèle d’indemnisation des intermittents du spectacle était rendu public par la Coordination des intermittents et précaires1. Cette étude, qui a été financée grâce à une subvention de trois conseils régionaux, présente plusieurs intérêts.

Elle innove d’abord dans sa méthode. Dès l’élaboration du projet de recherche et tout au long de sa réalisation, elle a associé des chercheurs et des intermittents dans une démarche commune. Cette forme d’expertise citoyenne tranche avec les rapports technocratiques qui constituent le lot commun de l’expertise " officielle ". L’étude combine par ailleurs une approche quantitative et qualitative. L’analyse quantitative, pour laquelle les chercheurs n’ont pu avoir accès aux données de l’Unedic, se fonde sur des simulations pour évaluer les effets concrets de différents modèles d’indemnisation. Elle ne se limite donc pas à un simple bilan financier purement comptable des effets de telle ou telle réforme.

Par ailleurs, ces simulations se nourrissent du diagnostic que délivre l’analyse qualitative réalisée à partir de plusieurs centaines d’entretiens. Ce diagnostic illustre les limites des catégories traditionnelles pour penser un système d’indemnisation du chômage. Les frontières entre les métiers, les activités et les fonctions (artistiques et techniques) sont devenues de plus en plus poreuses. Ce phénomène est sans doute plus aigu dans le cas des intermittents. Il traduit cependant une réalité plus générale qui a gagné nombre de salariés : celle de la discontinuité des emplois, des statuts et des droits. Loin d’être un phénomène de corporation, l’intermittence apparaît comme emblématique des transformations de la condition salariale.

Enfin, l’étude propose des solutions qui visent, en résumé, à renforcer la sécurité des salariés les plus précaires. Certains penseront sans doute qu’il s’agit là d’une solution de bon sens. Pourtant, c’est le chemin exactement inverse qu’a pris le système d’indemnisation du chômage depuis une vingtaine d’années. Alors que le gouvernement fait semblant de lorgner vers des " modèles " étrangers pour n’en retenir que des recettes libérales largement rebattues, voilà un nouveau modèle qu’il ferait bien de méditer. On n’ose lui suggérer de s’en inspirer.

À la une

Laisser un commentaire
Seuls nos abonnés peuvent laisser des commentaires, abonnez-vous pour rejoindre le débat !