Pénibilité : les ouvriers, premières victimes

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Alors qu’elles ont débuté il y a plus d’un an, les négociations entre partenaires sociaux sur la pénibilité du travail n’ont toujours pas abouti. Au vu des chiffres révélés par la dernière enquête Sumer sur les conditions de travail, publiée progressivement par la Dares (ministère de l’Emploi), il y a pourtant urgence à agir. Selon les indicateurs retenus par cette enquête, menée auprès de 50 000 salariés, on peut considérer qu’un travailleur est soumis à des conditions de travail physiquement pénibles lorsqu’il est exposé à au moins l’une des cinq contraintes hebdomadaires suivantes : positionnement debout ou piétinement pendant plus de 20 heures, manutention manuelle de charges de plus de 20 heures, gestes répétitifs pendant plus de 10 heures, vibrations transmises aux membres supérieurs de plus de 10 heures, contraintes de posture pendant plus de 2 heures.

Entre 1994 et 2003, la pénibilité physique a eu tendance à se réduire. Toutefois, plus de 40 % de l’ensemble des salariés étaient soumis à au moins une contrainte physique en 2003 (contre 45 % en 1994). Et ces chiffres cachent de profondes inégalités socioprofessionnelles, qui se sont renforcées ces dernières années. Alors que 9 % des cadres supérieurs étaient soumis à au moins une contrainte en 2003 (contre 11 % en 1994), c’était le cas de près des trois quarts des ouvriers non qualifiés (en stagnation depuis 1994). Les ouvriers sont également la catégorie la plus fréquemment exposée à des produits chimiques et celle pour laquelle les contraintes organisationnelles (longue durée de travail, travail de nuit, astreintes...) ont le plus augmenté.

Selon l’enquête, les 5 % de salariés qui ont les conditions de travail les plus pénibles sont en grande majorité des ouvriers industriels (65 %), des ouvriers de la manutention et des contremaîtres. En termes de statut d’emploi, on trouve dans cette catégorie un taux élevé de travailleurs précaires : ainsi, 9 % de ces salariés sont des intérimaires, soit trois fois plus que la moyenne. Ils sont à la fois soumis à des pénibilités physiques, à des contraintes organisationnelles et à des contraintes psychosociales (manque d’autonomie, forte pression au travail). Le tout est aggravé par une absence, plus fréquente que la moyenne, de soutien social (aide des supérieurs hiérarchiques ou des collègues). Un ensemble de facteurs qui favorise les accidents cardio-vasculaires, les dépressions et les troubles musculo-squelettiques. D’où l’enjeu, pour les syndicats, d’obtenir que les salariés ayant eu des conditions de travail difficiles puissent partir à la retraite de manière anticipée.

Part des salariés exposés à au moins une contrainte physique, en %, selon la catégorie socioprofessionnelle

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