Locataires de couleur s’abstenir

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Un test démontre l'ampleur des discriminations à l'encontre de candidats à la location d'origine étrangère.

Propriétaire cherche locataire blanc. " Cette petite annonce, trop ouvertement discriminatoire, n’apParaît bien entendu jamais dans les journaux. Mais les résultats du testing commandé par la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) montrent pourtant que les agences immobilières privilégient les candidats de " référence " - blancs, parlant sans accent et portant un " nom à parfaite consonance française " -, au détriment de ceux originaires du Maghreb ou d’Afrique noire, quand bien même ils sont de nationalité française et présentent les mêmes garanties (salaire trois fois supérieur au loyer et contrat à durée indéterminée). Le test a été réalisé sur 126 annonces, concernant le parc locatif privé et émanant de 120 agences d’Ile-de-France, de Lille et de Nice. Un échantillon certes assez restreint, mais " les résultats montrent des tendances lourdes et convergentes (...) qui laissent peu de doutes quant à la réalité de l’ampleur des discriminations ".

Dès le premier contact téléphonique, dans un tiers des cas (44 % en Ile-de-France, 32 % à Nice et 15 % à Lille), des différences de traitement apParaissent : l’appartement est déjà loué lorsque Mohamed ou Boubacar appellent, mais il est libre pour Pierre ; ou il est encore disponible, mais seul Pierre obtient un rendez-vous alors que les autres doivent laisser leurs coordonnées ; ou bien encore les questions posées au téléphone ou les garanties demandées diffèrent... A l’issue de cet entretien, 35 % des candidats de référence obtiennent une visite d’appartement, contre 20 % pour ceux d’origine maghrébine et 14 % pour ceux qui sont originaires d’Afrique noire. Le fossé se creuse encore quand sonne l’heure de la visite : 75 % des premiers obtiennent le logement, mais le résultat chute à 17 % pour les seconds et à 22 % pour les troisièmes. A contrats de travail et ressources strictement identiques !

Les tests validés par la loi

Les tests de discrimination avaient été jusqu’alors essentiellement utilisés par des associations. En septembre 2000, la Cour de cassation a reconnu leur validité comme mode de preuve, mais il a fallu attendre mars 2006 pour que la loi pour l’égalité des chances leur donne une pleine valeur légale. Depuis, la Halde a commandé ce test sur le logement et un second sur l’emploi : 1 080 curriculum vitae (CV) ont été envoyés en réponse à 60 offres publiées par la BNP, Sodexho et LVMH. Les candidats d’origine maghrébine ainsi que ceux âgés et d’apparence physique moins attractive ont des taux de réponse plus faibles, mais " les écarts ne sont pas suffisants pour conclure à une discrimination ".

" Ce test démontre une prise de conscience et une plus grande attention portée au traitement des CV ", avance la Halde, qui a annoncé qu’elle va en réaliser régulièrement d’autres et publier les résultats. Pour faire évoluer les pratiques, elle mise sur le souci qu’ont les entreprises de leur image, mais aussi sur la peur du gendarme. La Halde va en effet transmettre au procureur les cas de discrimination avérée constatés lors du testing logement. Encore faudrait-il que ces dossiers ne soient plus classés sans suite, comme c’est très souvent le cas jusqu’à présent.

www.halde.fr, rubrique " Actualité ", puis " Agenda ", à la date du 5 juillet.

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