Entretien

Les fonds vautours

3 min
Jean Merckaert directeur action et plaidoyer France au Secours catholique

Qu’est-ce qu’un fonds vautour ?

Ce sont des institutions financières qui rachètent à très bas prix les titres de la dette des pays pauvres. Dès que le pays débiteur devient un peu plus solvable, les fonds vautours l’attaquent en justice pour récupérer l’intégralité du prêt, majoré de pénalités de retard. Par exemple, Donegal, un fonds américain, avait ainsi racheté en 1999 une créance que la Roumanie avait sur la Zambie pour une valeur de 3 millions de dollars, alors que sa valeur faciale était de 15 millions de dollars. Donegal a ensuite poursuivi la Zambie devant les tribunaux britanniques en réclamant 55 millions de dollars, avec les arriérés. La justice lui a partiellement donné raison, en obligeant la Zambie à payer 17 millions de dollars. Soit une plus-value de 500 % réalisée sur le dos d’un des pays les plus pauvres du monde.

Quelles sont les conséquences pour les pays pauvres ?

Selon le Fonds monétaire international (FMI), 46 actions judiciaires de ce type sont en cours actuellement pour une valeur totale de près de 2 milliards de dollars. C’est relativement marginal par rapport à la dette extérieure publique globale des pays du Sud qui est de 1 600 milliards de dollars. Mais pour certains pays, cela peut représenter beaucoup. Au Nicaragua, en 2004, les fonds vautours ont réussi à récupérer 276 millions de dollars, un montant qui dépasse le budget annuel de la santé de ce pays.

Comment lutter contre ces pratiques ?

Un premier niveau d’action consiste à empêcher les fonds vautours de faire valoir leurs droits devant les tribunaux. La Belgique a voté une loi le 31 janvier dernier qui empêche ce type d’institutions financières de capturer l’aide belge au développement destinée aux pays endettés. Mais au-delà même du comportement des fonds vautours, il faut sanctuariser les dépenses sociales vitales des pays débiteurs face à l’ensemble des créanciers. Il faut établir un principe général qui s’applique aussi bien aux prêteurs privés que publics, un droit international de la dette qui limite les droits des créanciers et protège les débiteurs. Aujourd’hui, le contexte est assez favorable à une telle évolution. Le rapport de force a évolué : les pays riches craignent en effet que les pays émergents, et notamment la Chine, prêtent aux pays pauvres sans précaution, réenclenchant le cycle du surendettement. Ils sont demandeurs de règles du jeu et ont avancé l’idée d’une charte du prêt responsable lors du sommet du G8 réuni en 2007. Mais ils ne seront crédibles que s’ils assument leurs propres responsabilités dans l’endettement des pays du Sud.

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