Entretien

Travail forcé en Chine

2 min
Lu De Cheng arrêté en 1989 place Tien An Men et emprisonné pendant neuf ans en Chine

Le collectif Ethique sur l’étiquette a lancé en avril la campagne " Jouez le jeu pour les JO " afin de sensibiliser sur les droits humains au travail en Chine, et plus particulièrement chez les fabricants d’articles de sport en prévision des jeux Olympiques de Pékin cet été. Lu De Cheng, a été arrêté place Tien An Men en 1989. Emprisonné et soumis au travail forcé pendant neuf ans, il témoigne des conditions de travail dans les très nombreuses prisons chinoises.

Dans quelles conditions travailliez-vous en prison ?

Le travail forcé est systématique dans les prisons chinoises. Nous devions travailler quatorze heures par jour pour 3 yuans (3 centimes d’euro) par mois. Si nous ne respections pas les quotas imposés, nous n’avions pas le droit de dormir. La pression était très forte car les ouvriers étaient mis en compétition entre eux : quand un ouvrier parvenait à terminer une tâche dans les temps impartis, les gardiens augmentaient les cadences. Les prisonniers qui avaient un peu d’argent achetaient le travail des prisonniers les plus rapides. On n’en finissait jamais. Au cours de mes neuf années d’incarcération, j’ai successivement réparé des voitures, rempli des bouteilles de shampoing et fabriqué des cravates et des pulls en laine. Aujourd’hui, je sais que certains prisonniers fabriquent des ballons de foot. Comme ils les cousent à la main, ils ont les doigts en sang.

Sait-on pour quelles entreprises travaillent ces prisons ?

Les prisons font le travail que les autres usines ne veulent pas faire, car c’est toujours un travail très dur. Du fait des salaires très bas, cela permet à des entreprises de faire de la sous-traitance à des coûts défiant toute concurrence. Je sais que les ballons de foot et les pulls sont destinés à l’exportation, mais on ne connaît pas les destinataires finaux. C’est très opaque. Il s’agirait souvent de contrefaçons.

Sait-on pour quelles entreprises travaillent ces prisons ?

Les informations concernant les prisons sont un secret d’Etat. De plus, les pistes sont brouillées car toutes les prisons portent deux noms : celui du centre carcéral et celui du camp de travail. Par exemple, l’entreprise Cimenterie vie nouvelle est aussi la prison de Langsi. Cependant, on estime à 5 000 le nombre de prisons et à 10 millions le nombre de prisonniers.

Propos recueillis par Claire Alet-Ringenbach

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