Politiques budgétaires : Etats-Unis 1, Europe 0

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Les spéculateurs américains ont fait n'importe quoi et ce sont surtout les Européens qui trinquent. Explication de ce paradoxe.

C’est quand même un comble ! La crise économique qui frappe actuellement les pays développés est née de la folie spéculative du secteur financier américain. L’éclatement de la bulle de l’immobilier américain à l’été 2007, combiné à la hausse des prix du pétrole et des produits alimentaires, faisait redouter le pire. Et cela d’abord pour l’économie américaine. Pourtant, un an plus tard, c’est en Europe que les conséquences de ce krach sont les plus sévères.

L’activité économique européenne (et française) a reculé au second trimestre 2008, tandis que l’économie américaine continuait à croître au rythme de 1,9 % l’an. Une situation analogue s’était déjà produite après l’éclatement de la bulle de la high-tech en 2001 : combinée aux affaires Enron et autres, ainsi qu’aux attentats du 11 septembre, elle avait déclenché un sévère coup de frein sur l’économie mondiale. D’où vient ce paradoxe ? Essentiellement de la différence de réactions des autorités monétaires et budgétaires de part et d’autre de l’Atlantique. La gouvernance économique de l’Europe ne lui permet pas en effet de répondre de façon adéquate aux chocs conjoncturels.

Impulsions budgétaires américaines et européennes,en points de PIB

Les contraintes statutaires qui pèsent sur la Banque centrale européenne et l’absence de politique de change de l’euro ont pesé lourd dans les difficultés du Vieux Continent ces derniers mois (voir page 11). Mais la rigidité des politiques budgétaires du fait des règles fixées par le pacte de stabilité et de croissance joue aussi un rôle majeur dans les mauvais résultats économiques actuels de l’Europe. Pour s’en convaincre, il suffit d’examiner ce que les économistes appellent "les impulsions budgétaires" données des deux côtés de l’Atlantique, suite aux crises de 2001 et de 2007.

De quoi s’agit-il ? De la quantité d’argent, exprimée ici en % du PIB, injectée dans l’économie d’une année sur l’autre pour soutenir l’activité sous forme de dépenses publiques supplémentaires non financées par des impôts additionnels, autrement dit par augmentation du déficit public. Entre 2001 et 2003 (inclus), les pouvoirs publics américains ont injecté l’équivalent de 6,5 points de PIB dans leur économie, pendant que les Européens se contentaient eux de 3 points de PIB, plus de deux fois moins.

Rebelote en pire en 2007 et 2008 : les pouvoirs publics européens devraient même avoir, selon les chiffres de la Commission européenne, une action budgétaire globale restrictive sur l’économie de la zone euro à hauteur de - 0,3 point de PIB, alors que les Etats-Unis auront injectés dans leur économie 2,5 points de PIB supplémentaires. Un montant probablement sous-estimé d’ailleurs, car de nouvelles mesures ont été décidées outre-Atlantique depuis que ces chiffres ont été établis. Pas étonnant, dans ces conditions, que les crises financières venues des Etats Unis aient des effets moins sensibles outre-Atlantique que chez nous...

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