Discriminations : le voile se lève

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Un quart des enfants d'immigrés disent avoir été victimes de discriminations, selon une enquête menée par l'Ined et l'Insee.

14% des personnes âgées de 18 à 50 ans vivant en France disent avoir été victimes de discriminations dans les cinq dernières années. L’enquête Trajectoires et origines, dite " TeO ", menée par l’Ined et l’Insee en 2008 auprès de 22 000 personnes 1, livre ses premiers résultats (voir aussi page 59). C’est la première enquête d’une telle ampleur sur le sujet.

L’origine (ou la nationalité) est la cause la plus souvent évoquée (37 %), après la couleur de la peau (20 %), le sexe (17 %) et l’âge. Alors que seuls 10 % de la population dite " majoritaire " (ni immigrée, ni enfant d’immigré, ni originaire des DOM) déclarent avoir été discriminés, c’est le cas de 24 % des filles ou fils d’immigrés et de 26 % des immigrés eux-mêmes. 40 % des personnes se déclarant victimes sont des immigrés ou enfants d’immigrés, alors qu’elles représentent un cinquième des adultes.

Près de la moitié des fils ou filles d’immigrés venant d’Afrique subsaharienne estiment avoir été discriminés, et c’est aussi le cas de 40 % des enfants dont les parents sont originaires des départements d’outre-mer ou du Maghreb. La couleur de la peau joue un rôle majeur : elle est citée par 73 % des descendants issus des DOM et par 88 % des descendants originaires d’Afrique sub-saharienne. Dans la quasi-totalité des catégories, les enfants se sentent davantage visés que les parents : " Ils ont sans doute plus souvent tendance à interpréter en termes de discriminations des traitements défavorables, auxquels les immigrés se montrent plus résignés du fait de leur statut et de leur histoire ", commente l’Ined.

L’Institut a mesuré les effets des différents facteurs " toutes choses égales par ailleurs ". L’origine l’emporte de loin : à caractéristiques équivalentes, les immigrés ou les enfants d’immigrés ont une probabilité de se dire discriminés 6,5 fois supérieure à celle de la population majoritaire. L’effet catégorie sociale est très faible et les femmes tendent moins souvent que les hommes à s’estimer discriminées. En revanche, les jeunes, les plus diplômés, les chômeurs et les musulmans se sentent plus souvent concernés.

Sentiment de discrimination et discrimination ne sont pas équivalents. 13 % des personnes qui disent avoir été discriminées ont entrepris une démarche auprès d’un commissariat. Une partie des discriminations ressenties n’en sont pas réellement, dans une proportion indéfinissable. En même temps, certaines victimes n’osent pas faire les démarches (pour des raisons évidentes s’agissant des sans-papiers...) et il est souvent très difficile d’apporter la preuve de discriminations bel et bien réelles.

  • 1. Voir " Les discriminations : une question de minorités visibles ", Population et sociétés n° 466, avril 2010. Disponible sur www.ined.fr

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