Dossier

La route de l’ambre, ou la mondialisation avant l’heure

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Les hommes n’ont pas attendu l’Organisation mondiale du commerce pour échanger entre eux à une vaste échelle par-delà les frontières des Etats. La preuve ? On a trouvé dans la tombe du pharaon égyptien Toutankhamon (mort vers - 1327) des bijoux en ambre, une résine fossile de conifère qui provenait selon toute vraisemblance des bords de la mer baltique. Dès l’âge de bronze, presque deux mille ans avant Jésus-Christ, cet ambre était très recherché par les peuples méditerranéens qui lui attribuaient des vertus magiques. Une véritable " route de l’ambre ", désignée comme telle bien plus tard par l’auteur romain Pline l’Ancien (23-79 après J.-C.), s’était mise en place entre la Baltique et la Méditerranée. En retour, de nombreux objets grecs et romains ont été découverts en Scandinavie : ils correspondaient probablement au paiement en nature de l’ambre fourni.

De proche en proche

L’ambre n’est pas, loin de là, la seule denrée à avoir fait l’objet d’échanges lointains depuis la nuit des temps : de l’obsidienne provenant des îles volcaniques de la Méditerranée (une lave cristallisée riche en silice, bien adaptée à la fabrication d’armes et d’outils très tranchants) a été retrouvée très loin en Europe continentale. Les lapis lazuli d’Afghanistan sont fréquents eux-aussi dans tout le bassin méditerranéen. L’étain, abondant dans les îles britanniques, a été, dès la préhistoire, importé en Méditerranée via la Gaule pour permettre, allié au cuivre, de produire du bronze, beaucoup plus résistant. La fameuse route de la soie, reliant la Chine à l’Europe, aurait quant à elle commencé à fonctionner dès le second siècle avant notre ère.

Routes de la soie et routes de l’ambre

Bien sûr, dans ces contextes antiques, ces échanges lointains sont restés d’une ampleur limitée, réservés le plus souvent à quelques biens de grand prix destinés à de toutes petites élites. Ils n’ont pas conduit non plus à la naissance de l’équivalent de nos " entreprises transnationales ". Ce commerce au loin résultait le plus souvent d’une série d’échanges en chaîne de proche en proche. Même si des explorateurs grecs ou romains sont allés jusqu’à la Baltique, la route de l’ambre n’était pas parcourue par des commerçants romains ou grecs se rendant directement en Scandinavie ou l’inverse : les Scandinaves vendaient l’ambre aux Germains, qui eux-mêmes le revendaient à leurs voisins, etc. avant que, au bout du compte, ayant changé maintes fois de mains, il ne finisse par arriver dans le tombeau d’un pharaon égyptien.

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