Opinion

Energies renouvelables : une nouvelle occasion manquée

3 min
Pierre Girard directeur général de Valorem

En 2008, alors que les cloches du Grenelle sonnaient à toute volée, le gouvernement décidait de créer de toutes pièces une filière photovoltaïque. Pour ce faire, il mit en place un tarif de rachat très attractif de l’électricité produite par ces installations, ainsi que des réductions d’impôt importantes. Et Jean-Louis Borloo exhorta les chefs d’entreprise à investir dans cette nouvelle filière. Le message fut entendu. Mais voilà, nos stratèges gouvernementaux n’avaient visiblement à aucun moment anticipé le coût d’une telle politique : chaque kilowattheure étant subventionné à hauteur de 54 centimes d’euro environ, les 5 000 MW prévus généraient de fait un coût important à terme. La faiblesse des règles relatives aux installations donna lieu également à des abus. Mais au lieu de remettre à plat cette politique avec la profession, le gouvernement a modifié unilatéralement les tarifs (quatre fois en quelques mois), plongeant cette filière naissante dans une crise qui jette à la rue des milliers de salariés et entraîne la fermeture de centaines d’entreprises.

Ce manque de stabilité et de vision à long terme est malheureusement habituel en France. L’éolien en a subi lui aussi les conséquences avec la loi Grenelle 2, qui classe désormais les éoliennes parmi les installations industrielles dangereuses ! Ce qui augmente encore les délais des autorisations passés en une décennie de deux ans à plus de six, et bientôt huit avec la nouvelle législation ! Plombant là aussi lourdement une filière prometteuse...

Chez nos voisins allemands, la situation est tout autre. Les leaders mondiaux des éoliennes sont allemands. Dans le photovoltaïque, grâce à un niveau d’installation qui chaque année équivaut à l’objectif que nous nous sommes fixé sur dix ans (5 000 MW), les producteurs allemands ont automatisé toute la fabrication des panneaux. Ils sont frappés eux aussi aujourd’hui par l’invasion des modules photovoltaïques chinois, mais ce sont toujours eux qui fournissent les machines qui équipent ces usines chinoises. Moyennant quoi, 370 000 personnes travaillent aujourd’hui dans le secteur des énergies renouvelables, contre 160 500 en 2004. Et l’excédent commercial de l’Allemagne pour ce secteur est de 50 milliards d’euros environ sur un total de 156 milliards d’euros. Une telle progression n’a été possible que parce que la volonté politique a été forte dès le début et surtout constante pendant quinze ans. Les gains de productivité réalisés ont été répercutés sur les tarifs de rachat de l’électricité, mais leur évolution s’est faite en concertation avec les professionnels.

Ce dont a besoin un industriel pour investir, c’est de clarté sur l’avenir et de constance dans les règles du jeu. Faute de l’avoir compris, nous sommes en train de rater une nouvelle fois les opportunités de développement industriel que vont continuer d’amener les énergies renouvelables.

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