Un siècle de travail des femmes. 1901-2011

par Margaret Maruani et Monique Meron La Découverte, 2012, 230 p., 24 euros.

Margaret Maruani et Monique Meron signent un ouvrage de référence qui, en s’appuyant sur des analyses statistiques précises, remet en cause bon nombre d’idées reçues sur le travail des femmes. Ainsi, nous rappellent les auteures, les femmes ont toujours travaillé, même si cela a rarement été reconnu. L’effet des guerres, souvent cité comme l’un des principaux moteurs de l’activité féminine, est en réalité limité et a surtout été l’occasion pour elles de passer provisoirement de "l’univers obscur du travail peu réglementé et mal payé" à celui de l’industrie et de l’armement. Majoritairement, elles cumulent en France vie familiale et activité professionnelle, et interrompent de moins en moins leurs carrières professionnelles. Etant en outre de plus en plus diplômées et généralement concentrées dans le secteur tertiaire, moins exposé que l’industrie aux aléas conjoncturels, rien ne justifie qu’elles soient plus souvent au chômage.

Idée reçue

Quant au temps partiel, il s’agit d’un phénomène assez récent en France, où les femmes sont massivement entrées dans le salariat à temps plein. Favorisé par les politiques publiques, il contredit "la tendance à l’homogénéisation des comportements d’activité masculins et féminins observée depuis les années 1960". Une tendance que les chiffres passés au crible dans l’ouvrage n’ont de cesse de confirmer. La mixité tarde à se développer dans les professions les moins qualifiées, que cela soit dans les métiers traditionnellement féminins ou masculins. A l’inverse, du côté des métiers les plus qualifiés, "les subversions" se multiplient. De plus en plus de jeunes médecins, avocats et de jeunes cadres sont des femmes, sans pour autant que ces métiers, comme on l’entend trop souvent, se dévalorisent. Encore un cliché battu en brèche par Maruani et Meron !

Brouillage idéologique

"Compter et conter", telle est l’ambition que les auteures affichent au début de ce livre à la fois extrêmement bien documenté et bien écrit. Elles nous rappellent ainsi que les chiffres ne sont jamais neutres et que la façon dont on fabrique les statistiques participe à la construction sociale des phénomènes. En l’occurrence, écrivent-elles, il existe "un brouillage idéologique qui, de façon récurrente, occulte l’importance du travail professionnel des femmes, minimise le poids de leur contribution à l’activité économique du pays - et dévalorise par là même leur statut dans la société". Le travail d’analyse mené par Margaret Maruani et Monique Meron permet de leur redonner leur juste place.

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