Environnement

Prospective : les emplois de la transition verte

3 min

Selon les calculs de l'association négaWatt, la conversion écologique de la France créerait bien plus d'emplois qu'elle n'en détruirait.

Entre 570 000 et 820 000 emplois en 2030. C’est le nombre de postes à plein-temps que gagnerait la France si elle s’engageait aujourd’hui dans un plan massif de réduction de ses émissions de CO2, tel que l’imagine l’association négaWatt 1, un regroupement d’experts de l’énergie. Un objectif en phase avec la réalité du risque climatique : une réduction de 65 % de la consommation d’énergie primaire de la France en 2050 par rapport à 2010 et une division par 16 de ses émissions de CO2 à cette échéance. En prime, ce scénario intègre une sortie complète du nucléaire en vingt-deux ans, soit 2033.

Gagnants et perdants

En rejetant le nucléaire (ainsi que la capture et la séquestration du CO2, technologie bien incertaine), le scénario négaWatt met beaucoup plus l’accent que d’autres, comme l’Agence internationale de l’énergie, sur l’essor des renouvelables, les gains d’efficacité énergétique et l’évolution vers des comportements plus sobres, par exemple les usages partagés de l’automobile. Toutefois, comme tous les autres scénarios, il propose des solutions techniquement et économiquement réalistes et raisonne à confort égal - voire bien meilleur : il s’agit non d’un futur austère mais d’un avenir offrant une haute qualité de vie.

La défense de l’emploi est un argument régulièrement opposé par les adversaires de la transition écologique. De fait, une évolution vers une économie bas carbone menace des secteurs tels que la production d’énergie conventionnelle et les transports routiers ou aériens. Toute la question est de savoir si les créations, notamment dans la rénovation des bâtiments ou le secteur des renouvelables, compenseront les destructions d’emplois. L’économiste de l’environnement Philippe Quirion, chercheur au Cired-CNRS a fait ce calcul dans le cas du scénario négaWatt. Le bilan est positif : selon l’estimation moyenne, ce scénario induirait 235 000 emplois supplémentaires en 2020 et 632 000 en 2050 par rapport à une évolution suivant la tendance actuelle 2.

Effet sur l’emploi du scénario négaWatt par rapport à la tendance actuelle, en nombre d’emplois équivalent temps plein

Lecture : si le scénario négaWatt était appliqué, le nombre d’emplois dus à l’activité dans les énergies renouvelables serait supérieur en 2020 de 187 000 à ce qu’il serait en cas de poursuite de la tendance actuelle. Inversement, le nombre d’emplois dus au transport aérien serait inférieur de 27 000. Parce que le coût global est plus faible dans le scénario négaWatt, 97 000 emplois seraient créés par la réallocation des sommes économisées (effet induit). L’effet net global serait de + 235 000 emplois.

Effet sur l’emploi du scénario négaWatt par rapport à la tendance actuelle, en nombre d’emplois équivalent temps plein

Lecture : si le scénario négaWatt était appliqué, le nombre d’emplois dus à l’activité dans les énergies renouvelables serait supérieur en 2020 de 187 000 à ce qu’il serait en cas de poursuite de la tendance actuelle. Inversement, le nombre d’emplois dus au transport aérien serait inférieur de 27 000. Parce que le coût global est plus faible dans le scénario négaWatt, 97 000 emplois seraient créés par la réallocation des sommes économisées (effet induit). L’effet net global serait de + 235 000 emplois.

Si Philippe Quirion fait lui-même partie de l’association négaWatt, ses sources, ses hypothèses et sa méthodologie sont transparentes. Sa démarche a consisté à calculer les coûts des options retenues dans chaque scénario - négaWatt ou tendanciel - et de distribuer l’activité correspondante entre les 118 branches de l’économie française. Par exemple un milliard d’euros de rénovation thermique des bâtiments représente tel volume d’activité et donc tant d’emplois dans l’artisanat, les matériaux d’isolation...

Cette étude réserve des surprises : ainsi, la construction neuve perd beaucoup d’emplois par rapport au scénario tendanciel, dans la mesure où négaWatt envisage une stabilisation de la surface de logement par habitant. Mais ces pertes sont plus que compensées par les créations d’emplois liées à la rénovation de l’habitat. Surtout, le scénario négaWatt, du fait des économies d’énergie qu’il génère, est moins coûteux que le scénario au fil de l’eau, plombé entre autres choses par le coût du remplacement du parc nucléaire. Ce qui va libérer du pouvoir d’achat pour les consommateurs, dont le surcroît de demande se traduira également en emplois.

  • 1. Scénario négaWatt 2011, sur www.negawatt.org
  • 2. "L’effet net sur l’emploi de la transition énergétique en France : une analyse input-output du scénario négaWatt", avril 2013, sur www.negawatt.org

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