Société

La pauvreté fait des petits

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Le nombre et la part des pauvres dans la population a augmenté en 2011, selon l'Insee. Alors que les riches ne pâtissent pas de la crise.

Les nouvelles sur le front de la pauvreté en France ne sont pas bonnes. L’Insee, en publiant les résultats de son enquête sur les revenus des ménages en 2011, confirme ce que les acteurs de terrain pressentaient : le nombre (8,7 millions) et la proportion (14,3 %) de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté ont augmenté en 2011 pour la troisième année consécutive. Entre 2008 et 2011, le nombre de personnes en situation de pauvreté a progressé de 900 000, dont 200 000 entre 2010 et 2011. Quant au taux de pauvreté, il a progressé de 1,3 point depuis 2008 et de 0,3 point entre 2010 et 2011, un ralentissement que l’Insee souligne, mais qui n’est qu’une médiocre consolation.

La crise n’est pas la seule raison de cette paupérisation croissante. En effet, entre 2008 et 2011, le niveau de vie médian (la moitié de la population gagne plus et l’autre moitié moins) du vingtième le plus aisé de la population a progressé de 3,3 %, tandis que celui du dixième le moins favorisé a diminué de 1,8 % : malgré la crise, les premiers ont vu leur niveau de vie augmenter de 200 euros par mois, tandis que les seconds l’ont vu diminuer de 15 euros.

Encore ces chiffres sous-estiment-ils légèrement la réalité, car la hausse des prix frappe davantage les ménages les plus pauvres en raison de la hausse rapide des loyers et de la part plus importante de l’alimentation dans leur budget. Toujours est-il que l’affirmation selon laquelle "les pauvres deviennent plus pauvres et les riches plus riches", infondée jusqu’en 2008 en France, est devenue une réalité. Ce n’est donc pas seulement la crise qu’il convient d’incriminer, mais aussi la répartition des revenus.

Autre observation : parmi les adultes d’âge actif (18-60 ans) en situation de pauvreté, la grande majorité travaillent (2 millions) ou sont au chômage (1 million), et seuls 1,4 million (étudiants non compris) sont inactifs. La progression des travailleurs pauvres est continue depuis 2005, et ce sont ainsi 200 000 travailleurs supplémentaires qui, depuis cette date, sont tombés en dessous du seuil de pauvreté. Ceux qui parlent d’assistanat pour dénoncer l’aide sociale savent-ils seulement que les pauvres d’âge actif sont des travailleurs en emploi dans près d’un cas sur deux ? Quant aux enfants et aux jeunes de 15 ans ou moins, 300 000 d’entre eux sont venus grossir les chiffres de la pauvreté depuis la même date.

Davantage de très pauvres

Enfin, parmi les pauvres, c’est le nombre de très pauvres qui augmente le plus. En effet, l’Insee mesure deux seuils de pauvreté : le premier, le plus usité, est égal à 60 % du niveau de vie médian (soit 977 euros, ce qui correspond à environ le double du RSA "socle" actuel), le second étant égal à 50 % du niveau de vie médian (soit 790 euros, à peu près l’équivalent du minimum vieillesse actuel). Or, si le nombre de personnes en dessous du seuil de 60 % a augmenté de 200 000, neuf dixièmes de cette progression résultent de l’augmentation du nombre de personnes en dessous du seuil de 50 %. Un tel constat est inquiétant, car il signifie que ceux qui tombent dans la trappe à pauvreté voient leur sort se dégrader profondément.

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