Environnement

Numérique : du charbon dans le nuage

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L'empreinte carbone des technologies de l'information et de la communication s'avère très lourde...

Un smartphone, une tablette ou un ordinateur de bureau, ça ne consomme pas beaucoup d’électricité. Et en permettant d’éviter d’imprimer du papier, de transporter des sacs de courrier ou de prendre la voiture ou l’avion pour se réunir, ces outils passent pour être de grands amis de l’écologie, dans la mesure où ils permettent de dématérialiser l’économie.

En réalité, les électrons qui circulent dans ces petits appareils toujours plus puissants et dont le nombre explose dans le monde sont tout sauf virtuels. Et leur usage fait tourner partout des équipements gourmands en énergie : réseaux de communication, centres de routage et de stockage de données (le "nuage" ou cloud), sans oublier les usines qui fabriquent les terminaux régulièrement renouvelés par les consommateurs à grand renfort de campagnes publicitaires. Au total, l’énergie mobilisée chaque année par les technologies de l’information et de la communication (TIC) atteint des niveaux fantastiques. Une étude du cabinet américain spécialisé Digital Power Group fournit une estimation moyenne de 1 500 TWh d’électricité, soit la consommation de l’Allemagne et du Japon réunis1. Le seuil de 10 % de la demande électrique mondiale est en passe d’être franchi et le numérique représenterait une consommation d’énergie supérieure de 50 % à ce que brûlent les avions.

Systèmes énergivores

Le volume des "bits" circulant en une heure sur Internet devrait prochainement dépasser le trafic enregistré durant toute l’année 2000, indique encore l’étude. Cette croissance est beaucoup plus rapide que celle des gains d’efficacité énergétique comme ceux réalisés par exemple au niveau des data centers. Par ailleurs, et surtout, l’infrastructure sans fil, qui permet le déploiement des appareils mobiles et dont les capacités ne cessent de progresser (3G, 4G...), est bien plus énergivore que ne le sont les systèmes câblés. La généralisation de l’Internet mobile est ainsi en train de faire exploser la consommation électrique du secteur et pousse aux émissions de CO2. Aujourd’hui, la production électrique mondiale repose en effet encore essentiellement sur le charbon (46 %) et sur le gaz (23 %). Pire, selon l’Agence internationale de l’énergie, les centrales à charbon ont fourni 68 % de l’accroissement des capacités électriques dans le monde durant la dernière décennie. Et en dépit des progrès des énergies renouvelables, celles-ci ne devraient représenter que la moitié des capacités additionnelles au cours des dix prochaines années.

De son côté, le cabinet de conseil Carbone 4 vient de publier une note édifiante sur les émissions de CO2 des Français2. Les gains qu’ils ont réalisés au cours des cinq dernières années en faisant des travaux pour limiter la consommation d’énergie de leurs logements ont été intégralement perdus par la hausse des émissions liées à la seule fabrication des télévisions à écran plat, smartphones et autres tablettes qu’ils importent en quantités croissantes. Résultat : leurs émissions réelles de CO2 ne baissent pas.

  • 1. "The Cloud Begins With Coal. Big Data, Big Networks, Big Infrastructures, and Big Power An Overview of the Electricity Used By The Global Digital Ecosystem", par Mark. P. Mills, Digital Power Group, août 2013 (www.tech-pundit.com).
  • 2. "Sur les cinq dernières années, l’empreinte carbone des Français a stagné", Carbone 4, 27 août 2013 (www.carbone4.com/fr).

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