Opinion

Le bloc-notes de novembre 2013

4 min
Philippe Frémeaux Editorialiste

Nucléaire

François Hollande peut encore tenir sa promesse de fermer la centrale de Fessenheim au cours de son quinquennat. Mais cette décision symbolique, si elle intervient, sera bien l’exception qui confirme la règle : le gouvernement n’a aucunement l’intention de dévier de la ligne pronucléaire suivie par la France depuis les années 1970. En témoigne le récent accord entre EDF et le gouvernement britannique prévoyant la construction de deux réacteurs EPR dans le Somerset. Ou encore l’annonce désormais probable d’un allongement de dix ans de la durée d’amortissement des centrales françaises, en parallèle avec le programme d’investissement que devrait lancer EDF afin d’améliorer leur sécurité, suite à la catastrophe de Fukushima. Suprême astuce, l’allongement de la durée de vie des centrales va nous être présenté comme une mesure favorable à la transition énergétique : en améliorant les comptes d’EDF, elle permettrait de dégager les ressources nécessaires au développement des énergies renouvelables.

En attendant, on voit bien le profit que pourront tirer les actionnaires d’EDF - à commencer par l’Etat - d’une décision qui va permettre à l’électricien de réduire le montant de ses amortissements, et donc de dégager bien plus de profits. Le cours de l’action EDF a ainsi progressé de 70 % depuis le début de l’année.

Bretagne

Les nuages s’accumulent sur l’économie bretonne : faillite de Doux, fermeture de l’abattoir GAD, restructurations chez Alcatel et chez PSA. A l’origine de ces sinistres, des facteurs multiples. Doux a été victime de la fin annoncée d’un modèle fondé sur l’exportation subventionnée de volailles bas de gamme. GAD subit les conséquences de la baisse de la demande de viande de porc aggravée par le dumping social pratiqué par la concurrence allemande. Enfin, des entreprises venues s’implanter en Bretagne à la grande époque de l’aménagement du territoire, attirées par une main-d’oeuvre à la fois qualifiée, disponible et peu coûteuse, sont engagées dans de douloureuses restructurations.

Néanmoins, la Bretagne se porte plutôt bien. Longtemps terre d’émigration, elle a su valoriser ses atouts, former et retenir sa jeunesse, tout en tirant parti de sa douceur de vivre pour attirer de nouveaux habitants, au point qu’elle compte aujourd’hui autant d’emplois qu’à la veille de la crise financière. Au-delà de success stories comme Yves Rocher ou Armor Lux, la région abrite de multiples entreprises portées par des entrepreneurs souvent très attachés à leur territoire. C’est aussi un terrain fertile pour l’innovation technologique, notamment dans le domaine des produits de la mer. Et pour l’innovation sociale, comme en témoigne le dynamisme de l’économie sociale et solidaire bretonne. Il lui reste à sortir d’un modèle agricole qui a trop longtemps privilégié la quantité au détriment de la qualité, avec les conséquences que l’on sait sur le plan environnemental. La Bretagne doit aussi valoriser son potentiel en matière d’énergies renouvelables, afin de réduire sa dépendance énergétique.

École-entreprise

En installant le tout nouveau Conseil national éducation-économie le 18 octobre dernier, Jean-Marc Ayrault et Vincent Peillon ont affirmé leur volonté de mettre l’école à l’écoute des besoins des entreprises. C’est un vieux serpent de mer, dans un pays où l’école s’est longtemps d’abord préoccupée de former les clercs et les serviteurs civils et militaires de l’Etat avant de répondre aux besoins de la société et de l’économie. La domination de l’enseignement général sur l’enseignement technologique et professionnel en est une illustration, ou le fait que les formations à la gestion demeurent en grande partie payantes et laissées à l’initiative du secteur privé ou des chambres de commerce, tandis que les écoles d’ingénieurs, les facultés de lettres, de droit et de médecine sont gratuites ou presque.

La fonction de l’école n’est évidemment pas seulement de former la main-d’oeuvre dont les entreprises ont besoin. Elle doit transmettre à chaque enfant une culture commune et doter chacun des outils lui permettant d’exercer sa dignité de citoyen. A ceci près que c’est la maîtrise de cette culture commune et de ces outils qui permet d’accéder à l’emploi. Dans ces conditions, rapprocher l’école et l’entreprise, au-delà des nécessaires débats sur le pilotage de l’offre de formation, c’est d’abord lutter contre l’échec scolaire et rompre avec une pédagogie qui n’encourage pas assez l’autonomie, l’initiative, le travail collectif et le sens critique. De quoi former des citoyens plus éclairés et des actifs plus entreprenants !

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