Services et soins : la croissance se poursuit
L'emploi dans les métiers de l'aide et du soin aux personnes a connu un essor rapide qui devrait se poursuivre ces prochaines années.
L’expression "services à la personne" recouvre des réalités très différentes. Ainsi, le plan de 2005, dit "Borloo", de développement des services à la personne s’est centré sur ceux dispensés au domicile des particuliers, dont le recours a été encouragé via d’importantes exonérations fiscales et sociales. Les activités ici ciblées vont de l’emploi d’une femme de ménage à des formations en informatique, en passant par le soutien scolaire ou l’entretien du jardin.
Mais les services à la personne peuvent aussi renvoyer aux "services aux particuliers" de la nomenclature économique de synthèse de l’Insee, qui s’opposent aux "services aux entreprises". La notion est alors très large, englobant l’hôtellerie, la restauration, les activités culturelles et sportives, les services domestiques, la blanchisserie, les soins de beauté...
Enfin, dans une dernière acception, les services à la personne correspondent plutôt à l’ensemble des métiers du care (des soins), beaucoup plus ciblés, puisqu’il s’agit pour l’essentiel de la prise en charge de la petite enfance et de l’aide aux personnes âgées ou encore aux personnes handicapées. Que ces services soient rendus en institution, à domicile ou chez la personne qui les assure.
Beaucoup de temps partiels
Si nous nous concentrons sur les métiers de l’aide aux personnes, nous constatons un fort dynamisme de l’emploi et un certain nombre de tensions sur le marché du travail pour les recrutements. Ainsi, l’enquête Besoins en main-d’oeuvre (BMO) de Pôle emploi comptabilise près de 52 000 projets de recrutement d’aides à domicile en 2015, dont plus de 60 % jugés difficiles ; 41 000 d’aides-soignants, dont près du quart jugés difficiles ; 22 000 d’employés de maison, dont la moitié jugés difficiles ; et 10 000 d’assistantes maternelles, dont près de la moitié jugés difficiles.
Le vieillissement de la population en France se conjugue en effet à une natalité soutenue et à un taux d’activité féminin très élevé, ce qui engendre une demande sociale importante pour les métiers de la santé et d’aide aux personnes. L’essor des métiers des services à la personne et de la santé devrait donc se poursuivre dans les années à venir, d’autant que les besoins liés à l’aide aux personnes handicapées demeurent à la fois considérables et insuffisamment pris en charge.
Néanmoins, les chiffres concernant ce secteur sont à manier avec précaution, dans la mesure où une bonne part de ces emplois sont à temps partiel, voire très partiel, souvent exercés au noir. Prenons toutefois l’exemple des assistantes maternelles : il s’agit d’une des professions dont l’évolution a été la plus spectaculaire puisque ses effectifs n’ont cessé de croître, pour atteindre 500 000 personnes aujourd’hui, d’après la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares). 99 % de ces personnes sont des femmes et elles travaillent chez elles ou, moins souvent, au domicile des ménages, et le temps partiel concerne un tiers des emplois. De même, la pluriactivité et les situations de pluriemployeurs ne sont souvent pas prises en compte dans le calcul des effectifs. Ils représentent un vrai frein à l’embauche pour l’aide à domicile.
Comparées aux employés de maison et aux aides à domicile, les assistantes maternelles travaillent toutefois plus souvent à plein temps et sont donc, au final, mieux rémunérées, bien que leur rémunération horaire soit plus faible. Elles sont à 81 % en CDI. Il s’agit d’un des métiers où la demande devrait demeurer très soutenue dans les années à venir, d’autant que la part des plus de 50 ans y est très importante (34 % des effectifs).
La professionnalisation, un enjeu
Les professionnels du care ont ainsi aujourd’hui des profils et des statuts très différents. Les personnels des crèches, par exemple, disposent de qualifications reconnues dans le champ sanitaire et social et occupent pour la plupart des postes à temps plein correctement rémunérés.
En revanche, une grande partie des personnes qui travaillent à domicile demeure recrutées de gré à gré , même si on a tenté de développer des enseignes spécialisées dans ce domaine. Par ailleurs, l’évolution de la solvabilisation des besoins pris en charge par les activités liées au care est une question très importante. Actuellement, l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) pour les personnes âgées ne permet pas de financer une montée en qualification des personnes et maintient les associations d’aide et de soins à domicile qui opèrent comme prestataires dans de grandes difficultés. Or la loi d’adaptation de la société au vieillissement, qui devrait être adoptée d’ici la fin de l’année, ne devrait pas fondamentalement changer la donne1.
Un des enjeux majeurs du développement de ce secteur est donc de savoir s’il va s’orienter vers une professionnalisation. Ce qui ne suppose pas nécessairement d’exiger des salariés de disposer d’un niveau de diplôme élevé, car ces métiers constituent aussi un moyen pour nombre de personnes peu diplômées d’entrer sur le marché du travail. Il s’agit plutôt de partir de leurs compétences, à travers des plans de formation diplômants, pour mieux reconnaître leurs qualifications et permettre l’accès à des grilles de salaires assurant une revalorisation de ces métiers.
- 1. Pour approfondir, voir "Aide à domicile : pour bien vivre chez soi", Dossiers d’Alternatives Economiques, hors-série n° 1, avril 2015.