Éditorial

La deuxième vague

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Depuis la sortie, il y a un an, de la première édition de ce hors-série, l’activité a redémarré, les banques ont renoué avec les profits et les bourses se sont refait une santé. Il n’en fallait pas plus à certains pour décréter que la crise était finie. Il suffit de jeter un coup d’oeil à la situation du marché du travail pour démentir ce point de vue. Le chômage et son cortège de pauvreté et de découragement revient en force. En France, le seuil des 10 % de chômeurs vient à nouveau d’être franchi - et que dire de notre voisin, l’Espagne, où près d’un actif sur cinq est à la recherche d’un emploi. Mais les Etats ont brûlé toutes leurs cartouches pour sauver le système bancaire de la débâcle, il ne reste plus grand chose pour sauver les salariés du chômage.

La crise n’est pas finie : elle a muté. La première vague s’est brisée, dans un grand fracas de milliards, sur la digue des interventions publiques. Les Etats ont joué tous les rôles, à la fois prêteurs en dernier ressort, quand les banques avaient besoin d’argent frais, et emprunteurs en dernier ressort, quand le crédit privé s’est effondré. Ils ont laissé leur dette exploser pour permettre aux banques de réduire la leur. Mais cette digue n’est pas à toute épreuve. D’autant que les marchés financiers sont ingrats : on peut compter sur eux pour jouer maintenant les censeurs implacables des Etats jugés mal gérés. Aujourd’hui la Grèce, qui demain ?

Il n’y a donc plus de crédit qui tienne, il va falloir payer les pots cassés. Comment partager l’addition ? C’est toute la question - hautement conflictuelle - qui attend à présent les Etats. Ils ont dû collectiviser les pertes issues de la crise bancaire, vont-ils laisser celles de la crise économique à la charge de victimes qui, elles, ne sont pas responsables de leur sort ? Il en va de la paix sociale : il y a des limites aux injustices que des sociétés démocratiques peuvent supporter. Mais il en va aussi de la prospérité future. Jusqu’à la crise, la montée de l’endettement avait masqué la stagnation - voire la régression - des revenus des classes moyennes et populaires. Ce masque est tombé. Il n’y aura pas de reprise solide sans une nouvelle répartition des revenus. Mais le chemin sera long.

La deuxième vague de la crise est une lame de fond. Moins spectaculaire, elle pourrait être, si l’on n’y prend pas garde, plus ravageuse que la première.

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