Montbéliard

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Au creux du Jura et aux portes de l'Alsace, Montbéliard est typique des zones fortement dépendantes de l'industrie. De plus, elle est très spécialisée dans un des secteurs les plus exposés : l'automobile. Elle a, de ce fait, payé un lourd tribut à la crise. Les élus locaux réfléchissent aujourd'hui à sa revitalisation à l'échelle de l'aire urbaine de Belfort-Montbéliard.

La région de Montbéliard a une tradition industrielle très ancienne, avec l’horlogerie, le textile ou encore l’outillage. La famille Peugeot, originaire du pays, y a d’ailleurs fabriqué des moulins à poivre et des bicyclettes avant de se recentrer sur l’automobile. Au début du XXe siècle, elle a bâti à Sochaux son usine historique, site qui a compté jusqu’à 40 000 salariés et en emploie actuellement encore 12 000. D’où une influence considérable sur le territoire, qui va au-delà de la sphère industrielle puisque l’entreprise reste, par exemple, actionnaire majoritaire du FC Sochaux-Montbéliard, club de foot qu’elle a fondé.

Fortement touchée par la crise

L’industrie représentait 37 % de l’emploi en 2006 (contre 15 % en France). L’automobile et les équipementiers emploient à eux seuls 21 000 personnes, soit 26 % des actifs, voire 40 % si on y ajoute les postes d’intérimaires qui leur sont directement liés, la sous-traitance et la logistique.

Les actifs sont d’abord des ouvriers, catégorie davantage exposée aux secousses économiques que les cadres. Outre l’usine de Sochaux, on compte Peugeot Scooters et des sous-traitants comme Faurecia Systèmes d’échappement ou Siedoubs (sièges auto), racheté par Faurecia. Tous appartiennent au groupe PSA Peugeot Citroën. Le secteur est en recomposition et perd des emplois depuis trois décennies, une évolution que la crise a accentuée. Le choc de l’hiver 2008-2009 y a été particulièrement brutal. L’emploi salarié privé a reculé de 4,5 % dès 2008, bien plus que dans la moyenne des zones productives (2,5 %). Le taux de chômage, de son côté, a rapidement grimpé, passant de 9 % à l’automne 2008 à 11,6 % dès le premier trimestre 2009, et il tourne depuis autour de 12 %. Mais la prime à la casse et les dispositifs de chômage partiel ont eu un effet positif dès 2009, puisque l’emploi est légèrement remonté, à contre-courant de la tendance nationale.

Les réponses des pouvoirs publics visent à accompagner l’évolution du secteur. " L’objectif des aides est avant tout de créer plus d’emplois qualifiés et de permettre de s’adapter aux nouvelles normes européennes en matière de développement durable ", explique Dominique Musslin, le directeur de l’agence de développement et d’urbanisme du pays de Montbéliard. L’agglomération a ainsi racheté les locaux du sous-traitant Faurecia Systèmes d’échappement pour répondre à un besoin de trésorerie de ce dernier, ce qui lui a permis de créer, avec notamment l’aide de l’Etat, un centre de recherche et développement spécialisé dans le contrôle des émissions de gaz à effet de serre. Lancé en 2010, il emploie 370 personnes.

A une autre échelle, le pôle de compétitivité Véhicule du futur, constitué en 2005, finance des projets à cheval sur l’Alsace et la Franche-Comté. A Montbéliard, FAM Automobiles, une PME qui a conçu une technologie de gestion de l’énergie pour les scooters électriques avec l’appui du grand voisin Peugeot Scooters, a bénéficié de son soutien. Cette société a aussi un projet intitulé " F-City ", une voiture électrique partagée sur le modèle du Vélib’ parisien.

Montbéliard : structure de l’emploi

Les élus locaux et les établissements consulaires cherchent par ailleurs à consolider le tissu industriel. Ils soutiennent les nouvelles implantations économiques, notamment par le biais de fonds de reconversion, comme Aire urbaine investissement (AUI) : une SAS 1 créée en septembre 2009 et au capital de 100 000 euros dont l’intervention couvre l’agglomération du pays de Montbéliard et le département du Territoire-de-Belfort. Sa mission : compenser les réductions d’effectifs en distribuant des aides au développement économique sous forme d’avances remboursables.

Un territoire en mutation

L’emploi industriel a diminué de 12 % entre 1999 et 2006. Les ouvriers représentent toujours 36 % de l’emploi total (2006), mais ils sont 8 % de moins qu’en 1999. A l’inverse, les cadres sont un peu moins nombreux qu’ailleurs (11 % en 2006, contre 15 % en France), mais leur nombre augmente plus vite (de 39 % depuis 1999). Ceci est d’abord le fruit d’une mutation de l’industrie : les emplois de conception et de recherche ont bondi, avec une hausse de 72 %.

A côté de l’automobile, Montbéliard possède peu d’activités susceptibles de servir d’amortisseurs en temps de crise. L’emploi public y est relativement mal développé. On ne compte que 5,5 fonctionnaires pour 100 habitants (deux de moins que la moyenne nationale). Ils sont employés principalement à l’hôpital de Belfort-Montbéliard, à la municipalité ou à la communauté d’agglomération de Montbéliard. La zone ne peut guère compter non plus sur le tourisme, quasi inexistant. De nouveaux emplois apparaissent dans le tertiaire autour de la ville, mais surtout dans les services aux entreprises liés à l’externalisation croissante de différentes fonctions. Quant aux services aux particuliers, ils stagnent à un niveau bas.

Si le solde migratoire a été longtemps négatif sur le territoire, la fuite s’est aujourd’hui atténuée et elle est compensée par une natalité relativement forte. Reste que Peugeot constate la réticence de certains de ses cadres à venir travailler au centre de recherche de Sochaux. " Il manque un travail pour leur conjoint, une offre culturelle, des appartements dans un centre-ville ancien, un lycée international... ", explique un porte-parole du groupe. Une partie des nouveaux cadres qui travaillent dans la zone préfère vivre à Belfort, un lien de plus entre les deux villes voisines qui partagent aussi des infrastructures comme l’université et l’hôpital. L’arrivée du TGV à Belfort, prévue fin 2011, devrait attirer de nouveaux habitants en facilitant les échanges avec Paris, qui ne sera désormais plus qu’à 2 heures 15.

  • 1. A la fois société de capitaux, ce qui la rapproche de la société anonyme, et société de personnes, ce qui la rapproche de la société à responsabilité limitée. Le fonctionnement interne de la SAS est essentiellement défini par les statuts, c’est-à-dire par la volonté de ses associés. La SAS permet de dissocier le capital du pouvoir (tout en préservant certaines caractéristiques de la SA). Un associé peut ainsi disposer de prérogatives indépendantes de sa part de capital.

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