Moulins

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En Auvergne, Moulins, la préfecture de l'Allier, a pu compter un temps sur le secteur public pour réduire l'impact des crises, mais cet amortisseur lui a dernièrement fait défaut. Pour développer son attractivité, le territoire mise sur la logistique.

Préfecture de l’Allier, Moulins est historiquement une ville administrative : 27 % de l’emploi y est fourni par le secteur public, presque 10 points de plus que la moyenne enregistrée pour la province. La zone compte en effet 12,1 fonctionnaires pour 100 habitants, contre 7,4 en moyenne en province. C’est surtout la fonction publique hospitalière qui y est plus développée. Comme souvent, l’hôpital est le plus gros employeur de la zone, avec 2 000 salariés. Des emplois publics disparaissent cependant, notamment avec le départ du tribunal de commerce, transféré à Vichy. Le tribunal de grande instance devait l’être également, mais il restera au final dans la ville. " L’emploi public a amorti les précédentes crises, mais pas cette dernière ", constate Fabienne Thiery, responsable du service développement économique à Moulins communauté, la communauté d’agglomération.

L’industrie en recul

Moulins a bénéficié dans les années 1960 de quelques grosses implantations industrielles, mais il en reste peu de traces aujourd’hui : avec 11 % de l’emploi (contre 17 % en province), l’industrie y est faible. De plus, l’emploi industriel se concentre principalement dans quelques grosses entreprises, ce qui accroît d’autant l’impact sur ce type d’emplois lorsque celles-ci rencontrent des difficultés. Ce risque s’est illustré récemment à Moulins : Manitowoc, le fabricant de grues de la marque Potain, a supprimé une centaine d’emplois (il en reste environ 300), et JPM, qui produit des serrures, 130, pour quelque 300 salariés toujours en poste. Le sous-traitant automobile Bosch (300 salariés) ou la Somab, producteur de machines-outils (une cinquantaine d’emplois), se sont également séparés de nombreux intérimaires. Au total, la zone d’emploi a perdu 1 100 emplois salariés privés en 2008 et 2009, soit une réduction de 6 %, un impact bien plus marqué que la moyenne des zones comparables et qui inscrit Moulins parmi les territoires les plus touchés par la crise en France. Dominée par l’élevage, l’agriculture est aussi un secteur important dans cette partie du Massif central : elle emploie 2 300 personnes (7 % du total, contre 4 % en général en province). Mais, là comme ailleurs, l’emploi agricole est en recul.

Ces difficultés importantes ne doivent pourtant pas masquer le dynamisme du bassin de Moulins dans les années 2000. La zone avait ainsi gagné 2 500 nouveaux emplois entre 1999 et 2006. Ce dynamisme s’est accompagné d’une baisse du chômage, resté depuis à plus d’un point sous la moyenne nationale. Au dernier trimestre 2010, il était de 7,6 %, contre 9,2 % en France.

Un investissement dans la logistique

A l’image de sa région de rattachement, l’Auvergne, Moulins est très touchée par le vieillissement de la population : les plus de 60 ans représentent 26 % des habitants, soit 4 points de plus que la moyenne en province. De ce fait, les retraites pèsent significativement plus qu’ailleurs dans les revenus qui irriguent le territoire. Ce qui pourrait devenir un atout pour le développement de la zone. Les besoins spécifiques des seniors ont suscité une offre de services qui se reflète dans la structure de l’emploi. Dans le privé ou le public, la santé emploie par exemple 3 200 salariés, soit 11 % des salariés, 4 points de plus que la moyenne provinciale. Pour autant, la croissance des services aux particuliers reste faible et le commerce moins développé qu’ailleurs. " Nous voyons depuis longtemps les commerçants partir pour d’autres agglomérations ", constate la responsable du service développement économique. Il faut dire que la population diminue, même si cette baisse est désormais freinée : depuis 1975, Moulins et ses alentours ont perdu 6 400 habitants, soit 8 % du total. Mais à partir de 1999, ce recul est devenu moitié moins important qu’entre 1990 et 1999, du fait d’une amélioration du solde migratoire, qui reste cependant négatif.

Côté verre à moitié plein, " le cadre de vie privilégié, à 2 h 25 de Paris, avec un coût du foncier faible, attire ", argumente Fabienne Thiery. Des Franciliens notamment. Côté verre à moitié vide, de nombreux jeunes quittent toujours le territoire, lui préférant Clermont-Ferrand pour étudier, voire pour trouver un premier emploi. " Avec l’IUFM ou l’Ecole nationale du verre, nous offrons quelques formations, que nous cherchons à compléter en partenariat avec l’université de Clermont ", précise la responsable. Avant d’ajouter : " Mais, pour être véritablement attractif, il faut avant tout proposer beaucoup d’emplois. "

Pour cela, la communauté d’agglomération mise notamment sur la logistique, qui compte déjà des centres comme celui d’E. Leclerc, avec 260 emplois. Elle investit dans une zone d’activité de 184 hectares consacrée à ces activités : Logiparc 03. " Des études ont identifié le secteur comme un bon axe de développement : avec Intermarché, E. Leclerc ou l’armée de terre, nous avions déjà plusieurs grosses bases logistiques, ainsi que du foncier disponible sur un terrain plat et éloigné des habitations ", détaille Fabienne Thiery. Deux autoroutes passent, chacune à une trentaine de kilomètres, en direction de Paris et de Barcelone, et sur le terrain choisi, près de l’aérodrome, un embranchement va être construit afin de rejoindre le réseau ferré. Logiparc 03 sera sécurisé pour pouvoir accueillir en quantité certains produits chimiques (engrais, cosmétiques, etc.). Les premières entreprises doivent s’installer en 2012.

Quant au tourisme, il reste limité. Moulins et sa zone d’emploi compte toutefois quelques atouts pour le tourisme vert, avec une réserve sur les rives de l’Allier, et les châteaux de l’ancien berceau des Bourbons, ainsi qu’un parc d’attractions et animalier. Bref, à Moulins, l’équation reste difficile à trouver. Et la pression sur l’emploi public, qui devrait se renforcer au cours des prochaines années, ne devrait rien arranger.

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