Oxalis : aux entrepreneurs collectifs

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L'idée : des entrepreneurs individuels se regroupent en coopérative pour créer un nouveau rapport au travail

Oxalis est l’une des premières coopératives d’activités et d’emploi (CAE) à s’être créée. Une CAE, ce sont des entrepreneurs individuels, aux activités diverses, qui créent une entreprise commune dont l’objet est de fournir des services et un cadre de coopération à ses membres. Les services sont d’ordre technique (tâches de gestion, comptabilité, accompagnement, trésorerie solidaire...). La coopération est un moyen de consolider son activité par le partage d’expériences et la création d’opportunités d’affaires et de projets. En résumé, une CAE correspond à une sortie de la solitude pour l’entrepreneur individuel.

Développement et perspectives

La Ruche est l’un des sept établissements de la coopérative d’entrepreneurs Oxalis. Ses bureaux sont installés à Melle (Deux-Sèvres), et elle regroupe une trentaine d’entrepreneurs sur la région Poitou-Charentes. Il y a Marcelle, scénographe et décoratrice, Tony et Emmanuel, artisans spécialisés en éco-construction, Bernard, professeur de yoga, Anne-Laure, webmaster, ou encore Didier, photographe. La plupart ne partagent pas le même métier et pourtant ils partagent la même entreprise. Ils sont tous entrepreneurs-salariés d’Oxalis. C’est-à-dire que le chiffre d’affaires réalisé par chacun est facturé et encaissé par Oxalis qui en reverse aux entrepreneurs la part salariale qui leur revient - déduction faite des cotisations et d’une part forfaitaire destinée à financer les charges de la coopérative. Ce statut d’entrepreneur-salarié est l’une des innovations conçues par les CAE, qui les différencie des pépinières ou des couveuses d’entreprise. Il offre un cadre collectif et protecteur à l’entrepreneur sans brider son autonomie professionnelle.

Avant d’être l’établissement charentais d’Oxalis, dont le siège national est en région Rhône-Alpes (création en 1997), La Ruche était une association qui fonctionnait comme une couveuse d’activité. Sa vocation était d’aider des femmes, notamment dans le milieu rural, à créer leur entreprise. Mais La Ruche souhaitait devenir coopérative et accueillir des entrepreneurs prêts à s’impliquer à long terme dans la coopérative.

Les membres de La Ruche croisèrent le chemin des CAE et d’Oxalis et en 2007, l’association se fond dans la coopérative rhône-alpine pour en devenir un établissement secondaire. "Nous nous sommes rapprochés d’Oxalis, car nous sentions que l’histoire et l’identité charentaise de La Ruche resteraient présentes", se rappelle Samuel Barreau, délégué territorial de La Ruche, l’équivalent du directeur d’établissement.

L’autre dimension innovante des CAE est la pratique de l’entreprise partagée. "Nous recherchons un autre rapport au travail en dépassant le lien de subordination, voire en se libérant du travail", explique Sylvie Muniglia, présidente d’Oxalis. D’une part, les entrepreneurs-salariés sont invités à participer à des rencontres d’échange, des séminaires métiers, des formations et autres moments collectifs - qui peuvent d’ailleurs aboutir à des synergies professionnelles entre entrepreneurs-salariés. D’autre part, ils ont la possibilité de s’associer au capital de la coopérative et d’en devenir sociétaire avec une voix lors des assemblées générales.

"La description théorique de la coopération est délicate", prévient Samuel Barreau, mais pour tenter de résumer, il explique que "chacun a sa place. Dans son activité (dont il a la maîtrise) et dans la coopérative où il développe une préoccupation de l’autre. Chacun est autonome et responsable."

Après une phase d’expansion géographique, Oxalis va se concentrer sur la consolidation de l’existant (sept établissement dans cinq régions et 190 entrepreneurs salariés). Toutefois, elle ambitionne de voir son modèle essaimer. C’est pourquoi elle conduit avec Coopaname, une autre CAE, le projet de La Manufacture coopérative dont l’enjeu est de formaliser les savoir-faire de travail en coopération afin de donner les bons outils à tous ceux qui, à l’avenir, souhaiterait créer ou transformer une entreprise en coopérative.

L’organisation

La CAE est, sur le plan juridique une société coopérative de production, c’est-à-dire une entreprise dont le capital est détenu en majorité par ses salariés. A Oxalis, un délai de trois ans est laissé à l’entrepreneur salarié pour souscrire des parts sociales et devenir entrepreneur associé.

L’impact global

A côté du développement d’activités économiques et de l’émancipation des personnes (190 entrepreneurs salariés à Oxalis mi-2013), la troisième raison d’être d’Oxalis est de constituer "un acteur référent de transformation sociale". La forme CAE n’a pas d’existence juridique légale, mais la loi-cadre sur l’économie sociale et solidaire pourrait combler cette lacune. La reconnaissance par la loi doterait les entrepreneurs salariés d’une plus grande sécurité juridique et favoriserait la promotion de cette autre forme d’entrepreneuriat collectif, antithèse à l’auto-entrepreneuriat. Il existe une centaine de CAE en France, contre 500 pépinières d’entreprises.

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