Ardelaine : coopérative de territoire

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L'idée : construire une entreprise qui profite au territoire

En vitrine, Ardelaine est une marque ardéchoise de prêt-à-porter et d’articles de literie fabriqués à partir de laine locale. En arrière-boutique, c’est une entreprise qui a construit son développement en fonction de l’impact qu’il aurait sur le territoire. De la restauration de la filature pour préserver un savoir-faire local, au musée de la laine, qui draine des milliers de touristes par an dans le village, chaque entité d’Ardelaine a été créée pour renforcer l’économie locale, multiplier les opportunités d’emplois et finalement revitaliser une petite vallée ardéchoise.

Développement et perspectives

Ils ont créé leur entreprise parce qu’ils voulaient comprendre comment ça marche. L’histoire d’Ardelaine reste marquée du sceau de l’éducation populaire. Cette démarche d’apprentissage permanent et collectif a façonné le modèle de développement économique de cette société coopérative et participative (Scop) née au début des années 1980, au fin fond d’une vallée ardéchoise, à Saint-Pierreville.

Tout a commencé par l’idée de faire revivre une filière lainière ardéchoise alors que les éleveurs eux-mêmes ne donnaient plus de valeur à la laine. L’idée passionnait les fondateurs, car il s’agissait de reconstruire une économie dans une vallée désertée, en ravivant un savoir-faire local et traditionnel. Ils ont tout appris, de la tonte à l’entretien des cardeuses, en passant par la confection de matelas de laine, qui sont encore le produit phare de la coopérative. A chaque étape de la mise en place de la filière (approvisionnement, production, distribution), l’équipe d’Ardelaine s’est posé la question : "Comment faire pour que l’entreprise reste au service de l’emploi, de ses salariés et de son territoire ?"

Le choix d’ouvrir un musée de la laine fait partie de ces décisions qui illustrent la méthode Ardelaine. Au début des années 1990, les produits trouvent leur marché. Il serait possible de développer les ventes vers l’Europe et même au Japon. Mais la Scop préfère se recentrer sur la vente directe, à la filature ou sur des salons, et créer un musée de la laine qui attirera jusqu’à 20 000 visiteurs par an. Des touristes qui vont découvrir une tradition, acheter les produits qui en sont issus, loger dans les gîtes alentours ou à l’hôtel du village.

De fil en aiguille, c’est tout un écosystème socio-économique qui a transformé la vie du village. Une crèche est ouverte, l’école est sauvée et Saint-Pierreville est choisi pour accueillir une Maison de la Châtaigne qui renforce l’attractivité touristique du lieu. A Ardelaine, les projets se succèdent avec l’agrandissement du musée, la construction d’un nouveau bâtiment qui accueille un café-librairie, un restaurant riche en produits locaux et un laboratoire alimentaire où une équipe fabrique des conserves ou loue les lieux à des producteurs qui souhaitent transformer leurs propres produits. "C’est un vrai petit village quand on arrive à Ardelaine maintenant", sourit Béatrice Barras, l’une des fondatrices de l’entreprise.

Chez Ardelaine, l’égalité salariale est un principe. Bien que les métiers se soient diversifiés avec l’ouverture des nouvelles activités, le principe reste le même et chaque salarié cultive plusieurs compétences. Celui qui fabrique des matelas pourra aussi les vendre, celui qui fait le guide au musée pourra aussi manier la cardeuse. Cette transversalité des compétences s’accorde avec l’esprit de l’entreprise, projet global.

Le chiffre d’affaires, en hausse de 5 % en 2012, laisse entendre que les produits fonctionnent. Toutefois les marges se réduisent avec la hausse du prix des matériaux, de l’énergie et même de la laine dont "les prix augmentent à cause de la demande chinoise. Nous sommes protégés par des partenariats qui sont anciens et profonds avec les éleveurs, mais nous avons tout de même augmenté le prix d’achat", remarque Béatrice Barras.

Après avoir lancé de nouvelles activités, le prochain défi est probablement celui de la transmission. Les fondateurs encore présents doivent prendre leur retraite à échéance de deux ans. Ce sont eux qui sont à l’origine de l’histoire et des mille savoir-faire et savoir-être qui font l’innovation permanente d’Ardelaine. C’est ce patrimoine qu’il sera question de prolonger pour maintenir l’intégrité du projet de coopérative de territoire.

L’organisation

La Scop Ardelaine s’occupe en interne de toute la filière de production-commercialisation, ainsi que de l’espace café-librairie. Les autres structures peuvent être liées à la Scop en tant que filiale avec une participation minoritaire (le restaurant), ou du fait d’une convention de partenariat qui lie leur destin, comme le musée et la conserverie.

L’impact global

37 emplois en équivalent temps plein, qui ont permis à des familles de s’installer alentour. Une école stable, une crèche, un hôtel et une Maison de la châtaigne : cette énumération illustre l’impact d’Ardelaine sur le territoire.

La vallée, située à plus d’une heure de Valence, vivait un mouvement de désertification progressive avec la disparition des entreprises locales qui fermaient ou se déplaçaient vers la vallée du Rhône. Ardelaine a permis de relancer une dynamique positive qui aboutit aujourd’hui au maintien d’un village d’Ardèche dans son intégrité patrimoniale, tout en maintenant sur place une population jeune et active.

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