Le théorème d’Haavelmo

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Encore un "Nobel d’économie" (cuvée 1989) : Trygve Haavelmo (1911-1999), économiste norvégien un peu touche-à-tout, mais profondément keynésien. Keynes avait soutenu que, lorsque la demande effective n’était pas suffisante dans une économie donnée, provoquant un ralentissement économique (une récession), voire une dépression (baisse de l’activité), l’Etat pouvait relancer la machine en dépensant plus d’argent qu’il n’en gagnait. Le déficit public qui en résultait n’était alors que transitoire, puisque la relance de l’activité, en gonflant les recettes fiscales, allait permettre de le réduire. Les nouveaux classiques avaient rétorqué, dans les années 1980, que les gens ne sont pas fous : quand ils voient les déficits publics se creuser, ils savent qu’il leur faudra payer un jour ou l’autre les frais de la noce ; et ils mettent de l’argent de côté, ce qui annule l’effet de relance de la dépense publique (phénomène baptisé "équivalence ricardienne", parce que déjà avancé par Ricardo).

Mais c’était sans compter avec Haavelmo. Pourquoi donc emprunter pour financer la dépense publique supplémentaire destinée à relancer l’économie, s’étonna-t-il ? Le but poursuivi sera également atteint si l’on augmente les impôts sur le revenu ou sur la fortune de la partie la plus aisée de la population dont l’importante épargne provoque l’insuffisance de demande. Les impôts supplémentaires serviront à financer la relance sans que l’Etat ait besoin d’emprunter. Cela marchera à une condition : que ce prélèvement supplémentaire n’amène pas les contribuables visés à réduire leurs investissements ("l’effet d’éviction", disent les économistes). Car si l’Etat relance, mais que les riches (particuliers ou entreprises) réduisent leurs investissements d’autant, ceci annulera cela et on se retrouvera au point de départ. En outre, Haavelmo soulignait que, en économie ouverte, il était tout à fait possible que le surplus de dépenses publiques aboutisse à gonfler les importations plus que la production nationale. C’était un keynésien prudent.

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