Réforme de la pac

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Rural ou citadin, chacun en pince davantage pour les bocages et les alpages pâ­turés que pour de mornes plaines gorgées de nitrates et la puanteur des élevages industriels. Le citoyen peut donc comprendre qu’il doive y être un peu de sa poche pour que ses verts paysages ne deviennent pas des déserts voués à la friche ou à la monoculture intensive. Mais quand sa contribution - 9 euros par mois et par Européen - va en priorité à ceux des agriculteurs qui saccagent le plus l’environnement - grands céréaliers et éleveurs intensifs notamment -, il se sent floué.

Il est logique que certains soient plus aidés que d’autres. On rémunère en effet mieux son travail en vendant du foie gras ou du vieil armagnac que des tonnes de blé. Ainsi, dans la France de 2005, les aides d’un producteur en grandes cultures (céréales, oléoprotéagineux) dépassaient de moitié son résultat net. Sans les aides, son revenu annuel aurait été très négatif. Cet agriculteur n’est pas riche pour autant : 20 000 euros par an en moyenne s’il travaille à temps plein. C’est beaucoup moins que les 36 000 euros que gagne un viticulteur moyen, quant à lui peu subventionné, mais beaucoup plus qu’un horticulteur, lui aussi fort peu aidé, qui se contente de 14 000 euros en moyenne. Cependant, quand les cours mondiaux des céréales explosent (de 100 euros la tonne de blé en 2005 à 250 euros ces derniers mois) sans que les aides ne soient baissées, la compréhension du contribuable touche sa limite.

La négociation du budget de la PAC pour l’après-2013 démarre dès cette année, alors qu’avec les cours élevés éclatent au grand jour les inégalités de la politique agricole, entre producteurs, entre productions, entre Etats membres, entre générations présentes et futures. L’occasion de remettre les pendules à l’heure ? Encore faudrait-il que les Vingt-Sept admettent que les intérêts nationaux ne peuvent être l’alpha et l’omé­ga de leurs arbitrages financiers. Le risque est en outre que les prix agricoles, promis à rester élevés pour cause de demande asiatique soutenue et de boom des agrocarburants, ne soient un pré­texte pour réduire le budget de la PAC à moindres frais politiques. On n’aurait pu pourtant rêver meilleur contexte pour répartir autrement les aides, en fonction d’orientations que le débat démocratique devrait définir.

Car la PAC ne coûte pas si cher. Il faut en mesurer le prix réel à l’aune de ce que les Etats auraient dépensé s’ils avaient dû financer leur politique agricole sur une base nationale. Si elle repré­sente près de la moitié du budget européen - lui-même 1 % du PIB des Etats membres -, c’est qu’elle est le seul secteur économique organisé sur la base communautaire. Ce n’est pas le budget de la PAC qu’il faut réduire, c’est l’Europe qu’il faut reconstruire.

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