Brésil : le "poumon de la planète", un enjeu international

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Le défi de Brasília consiste surtout à mettre enfin un terme à la déforestation en Amazonie, malgré le lobbying actif de son agro-industrie.

La déforestation est l’une des causes majeures du réchauffement climatique. Et dans ce domaine, le Brésil est l’un des plus grands pollueurs de la planète : la déforestation représente 75 % des émissions de gaz à effet de serre du pays. Ce phénomène concerne surtout l’Amazonie, qui a un rôle central dans le cycle mondial du carbone. Le Brésil est dès lors très critiqué par les pays développés pour son incapacité y à mettre la fin. Incapacité qui, à leurs yeux, met en lumière la faible souveraineté effective du pouvoir central dans cette région du pays et qui requiert une internationalisation du sujet. Ces mises en cause affaiblissent la position de Brasília dans les négociations climatiques internationales en cours.

Plusieurs facteurs expliquent la dévastation de l’Amazonie : l’appropriation illégale de terres de l’Etat ("grilagem"), le marché noir du bois, la prolifération des mines, etc. Mais c’est surtout l’expansion de l’élevage du bétail qui est à la source de la destruction de la forêt. Outre les dégâts causés à la biosphère, les petits paysans, les communautés traditionnelles et les Indiens sont les principales victimes du modèle actuel de développement de l’Amazonie.

Au Brésil, le débat concernant les positions que doit prendre le pays dans les négociations internationales sur le climat est traversé par de nombreuses controverses qui reflètent les divergences d’intérêt des acteurs concernés. Les milieux industriels et agro-industriels effectuent un lobbying très actif auprès du ministère des affaires étrangères. Ils accusent les pays riches d’être historiquement responsables de la crise climatique et demandent donc que ces pays contribuent à financer des programmes de développement durable en Amazone. Ces mêmes milieux estiment que le Brésil, quant à lui, n’a pas à se fixer d’objectifs en matière de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.

Les ONG - nationales ou liées à des réseaux internationaux - défendent une opinion contraire. Elles font pression sur le gouvernement pour qu’il définisse des objectifs de réduction des émissions brésiliennes pour l’après-Kyoto. Pour autant, elles lui ne demandent pas de souscrire des engagements contraignants et quantifiés en la matière - qui, selon elles, relèvent de la responsabilité des pays développés ayant émis, au cours de leur industrialisation à partir du XIXe siècle, l’essentiel des gaz à effet de serre aujourd’hui accumulés dans l’atmosphère. Notamment en détruisant leurs propres forêts. Le ministère de l’environnement, de son côté, défend la nécessité de mettre en oeuvre des politiques publiques durables (certification de produits environnementaux, création d’unités de conservation de la nature...) et s’oppose à l’expansion rapide de l’agriculture des fronts pionniers qui favorise les produits agro-industriels (soja, viande, bois).

Face au défi que constitue le changement climatique, le gouvernement de Lula fait preuve d’ambiguïté et d’immobilisme, alors même que la protection de la forêt et de la biodiversité sont des atouts essentiels pour le Brésil dans le cadre de la crise écologique mondiale. Ces atermoiements s’expliquent sans doute par la persistance de l’idéologie développementaliste chez les élites brésiliennes, qui, traditionnellement, a vu dans le défrichage de la forêt un facteur d’expansion et de progrès. Pourtant, la forte influence dont le Brésil bénéficie au sein du groupe des 77, qui regroupe la plupart des pays en voie de développement, pourrait en faire un leader concernant les modèles de développement alternatifs fondés sur l’utilisation d’énergies renouvelables (solaire, éolien, biomasse), outre son devoir de mettre fin à la déforestation de l’Amazone.

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