Claude Guéant : cet homme est dangereux pour nos armées

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C’est un aveu qui coûte, forcément.

Mais à la fin, il faut bien le confesser : Claude Guéant est une menace pour la défense nationale. Soyez gentils, ne lui dites pas trop brutalement. Sous ses dehors un rien glacials, cet homme est (peut-être) un grand sensible. Et à coup sûr, il se veut bon patriote. N’est-ce pas en arguant de la protection de la nation qu’il veut lutter contre l’immigration clandestine, mais aussi réduire à sa plus simple expression l’immigration légale ?

Et bien, ce faisant, Monsieur le ministre, vous mettez votre pays en danger. Pour le comprendre, c’est facile : il faut que vous retourniez à l’école. A l’École militaire, plus précisément. Le 19 janvier dernier, le contre-amiral Philippe Coindreau y donnait une conférence intitulée " Les forces françaises à l’épreuve du feu libyen ". L’officier supérieur sait de quoi il parle, car il commandait la Task Force 473, navale et aérienne, durant cette opération, poétiquement surnommée " Harmattan ". Il a donc détaillé les différents navires et leurs rôles spécifiques, vanté la qualité de ses troupes et la bonne coopération avec les autres pays de l’OTAN, etc... Tout cela était instructif, mais ne vous aurait sans doute pas appris grand-chose, Monsieur le ministre. C’est la fin qui vous aurait édifié.

Pendant la séance de questions-réponses, un auditeur a demandé au contre-amiral dans quelle langue les armées de l’OTAN avaient échangé avec leurs alliés libyens du Conseil national de transition (CNT). Et là, l’officier supérieur s’est lancé dans un panégyrique des " p’tits gars "... de nos banlieues. De nos cités en fait, où les fils d’immigrés arabes sont nombreux. Ah oui, Monsieur le ministre, il faut qu’on vous dise, puisque par définition, la Grande Muette n’est pas causante : les engagés aujourd’hui sont de plus en plus souvent de type extrêmement " méditerranéen ", pour reprendre une catégorie connue de vos services. Cela n’a rien de surprenant. Dans beaucoup de pays, les armées sont un moyen d’insertion professionnelle pour ceux qui sont discriminés sur le marché du travail. Le nombre de soldats noirs dans les films de guerre américains ne vous a sûrement pas échappé.

Bref, le contre-amiral Coindreau a expliqué que la communication avec le CNT ça allait encore, qu’on se débrouillait avec la langue de Shakespeare, mais qu’une autre tâche de l’armada française consistait, grâce à ses moyens de surveillance, à espionner les conversations des hommes

de Kadhafi pour savoir ce qu’ils tramaient. Or ces particuliers-là ne causaient pas français. Ni anglais. Ni rien de ce qui se parle couramment à l’OTAN. Ils discutaient en arabe dialectal libyen... Par chance, il y avait sur les bateaux de la Royale de jeunes marins originaires du Maghreb qui comprenaient cet arabe-là. Et l’amiral de vanter les qualités d’un quartier-maître transformé du jour au lendemain en expert linguistique, et qui est passé d’un navire à l’autre pour traduire, à tour d’oreilles et sans compter ses heures, les conversations des hommes de Kadhafi. Songez, Monsieur le ministre, à ce qu’il serait advenu de la " croisade " (ça, c’est vous qui l’avez dit) de Nicolas Sarkozy et Bernard-Henri Lévy si votre prédécesseur avait empêché les parents de ce dévoué soldat de franchir nos frontières.

Avant d’ourdir de nouvelles lois sur l’immigration, écoutez bien les militaires, ils vous le diront : depuis que l’Union soviétique a disparu, on ne sait plus trop d’où va surgir l’ennemi. Ni quelle langue il parlera... Il faut à la France des experts linguistiques d’un peu partout. Dans l’intérêt du pays, Monsieur le ministre.

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