Chine : il a joué la carte du pragmatisme

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Barack Obama, qui ne croit pas que les États-Unis soient sur le déclin face à une Chine en pleine ascension, joue habilement du rapport de forces et des alliances de son pays en Asie.

Face à la Chine, le bilan de ces quatre années de présidence Obama est globalement positif.

Les autorités américaines ont su gérer leurs relations avec Pékin de manière prudente et équilibrée, alors même que les deux pays ont de nombreux sujets de divergence et de rivalité qui pourraient les mettre en conflit. Il est vrai que le président américain, confronté à bien d’autres défis, n’avait aucune envie d’une crise majeure avec la Chine. Et les dirigeants chinois se trouvent dans une situation similaire. Eux aussi ont de nombreux problèmes politiques, sociaux, économiques à résoudre, et cherchent à éviter de fortes tensions avec les États-Unis.

La politique de Barack Obama vis-à-vis de la Chine s’inscrit dans une vision de l’évolution du monde et des rapports de force. D’une part, sous sa présidence, les États-Unis ont rééquilibré leur politique étrangère vers l’Asie-Pacifique, région dans laquelle ils souhaitent être davantage intégrés, sur le plan économique notamment, alors qu’auparavant, ils étaient plus tournés vers l’Europe et le Moyen-Orient. Cette implication croissante est évidemment observée de près par Pékin qui scrute le moindre geste américain, d’autant que la Chine connaît actuellement un changement d’équipe dirigeante. D’autre part, et de manière plus globale, beaucoup d’analystes américains estiment que nous assistons à un bouleversement des rapports de puissance sur la scène internationale. La Chine serait en pleine ascension tandis que les États-Unis seraient sur le déclin. La politique de Barack Obama montre qu’il ne partage pas cette analyse, et il a raison. À ses yeux, les États-Unis sont toujours en position de force pour traiter avec la Chine. Sur certains sujets, comme les droits de propriété intellectuelle, domaine dans lequel Pékin mène une politique de vol systématique organisée par l’État, Barack Obama n’a d’ailleurs cessé de la mettre publiquement en cause, ce que ses prédécesseurs n’avaient guère fait, inconscients sans doute de l’ampleur du phénomène (lire p. 27). De même, les autorités américaines dénoncent avec virulence l’espionnage et les cyber-attaques de la Chine contre des intérêts américains. La politique de Pékin en Syrie, par exemple, est également critiquée par l’administration Obama.

Sur certains sujets, comme le cours de la monnaie chinoise que de nombreux décideurs américains estiment délibérément sous-évalué par Pékin pour favoriser ses exportations, les moyens de pression des États-Unis apparaissent plus limités. Ce qui reflète l’interdépendance des économies américaine et chinoise aujourd’hui : aucun des deux pays ne peut prendre d’importantes mesures de rétorsion contre l’autre sans risquer d’en subir le contrecoup.

En matière sécuritaire, Barack Obama a souhaité favoriser un dialogue direct entre militaires américains et chinois pour éviter par exemple qu’un banal incident conduise à une escalade dangereuse entre les deux pays. Dans le même temps, il a vendu plus d’armes à Taiwan en quatre ans que George Bush durant ses deux mandats, car la politique américaine en la matière est dictée par la menace que la Chine fait planer sur l’île. Or les dépenses militaires chinoises augmentent rapidement. Notons cependant qu’il a refusé de vendre des avions de chasse F16 de nouvelle génération à Taiwan, sans doute pour ne pas inquiéter la Chine. Sous la présidence de Barack Obama, les droits de l’homme ont été un sujet de second plan dans la relation avec Pékin, même si le président américain a rencontré le dalaï-lama. La question des dissidents a été traitée avec beaucoup de pragmatisme. Ainsi lorsque Chen Guangcheng s’est réfugié à l’ambassade des États-Unis en avril dernier, juste avant une visite de la secrétaire d’État Hillary Clinton, les États-Unis se sont efforcés d’aboutir discrètement à une solution (le dissident a pu quitter son pays pour les États-Unis) sans mettre la Chine en difficulté, mais sans dissimuler les profondes divergences entre les deux pays sur la question des valeurs démocratiques, ce qui n’est évidemment pas du goût de Pékin".

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