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États-Unis : Hollywood, cette star des ciseaux

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La capitale autoproclamée du cinéma n'est pas le paradis des réalisateurs. L'Amérique puritaine a une longue pratique de la censure, depuis l'époque de la prohibition, qui n'a rien à envier à celle en vogue dans des pays plus conservateurs.

Version intégrale non-censurée". La précision inscrite sur nombre de DVD dit bien ce qu’elle veut dire : si version non-censurée il y a, c’est qu’il existe une version censurée. Et oui, même à Hollywood, terre de tous les possibles par excellence, les cinéastes ne sont pas réellement libres de leur mouvements de caméra. Même les rares auxquels la production accorde le final cut, le dernier mot en matière de tournage et de montage. Car la mystérieuse Cara veille au grain. La Cara (Certification and Rating Administration) est une émanation de la MPAA, la toute-puissante association des grands studios américains. Elle visionne chaque film avant sa sortie en salles afin de "donner aux parents l’information nécessaire pour décider si un film est approprié pour leur famille". Elle est en place depuis 1968 et l’abolition du code Hays, le très prude code de censure adopté en 1934 par les grands studios pour se prémunir contre toute intervention de l’État fédéral. L’ennui, c’est que personne ne connaît les membres de la Cara, hormis le fait qu’il s’agit de "parents". Officiellement, pour les protéger de toute pression extérieure. Et pour cause explique Kirby Dick, dans This film is not rated yet. Pour le documentariste indépendant, la Cara a tous les attributs d’un comité de censure ultra-conservateur. Censure économique : en théorie, le passage devant la Cara n’est pas obligatoire, mais ne pas y présenter un film revient à ne pas pouvoir en faire la promotion et l’exploiter. Censure artistique : même les films indépendants - qui n’ont pas été financés par les majors - doivent obtenir le précieux visa et donc correspondre à ses exigences. Censure politique : fortement influencée par les ligues de vertus, la Cara est plus que sourcilleuse en matière de sexualité, de consommation de substances illicites, de vulgarité verbale, ou encore d’égalité des genres. Du dessin animé South Park (vulgarité) à Requiem for a dream (drogues) en passant par Boys don’t cry (homosexualité) nombreux sont les films que la Cara a menacé de ne pas avaliser ou proposé (rien n’est imposé !) de modifier en l’échange d’une moindre restriction d’âge. La légende d’Hollywood raconte même que pour protéger leurs films, Martin Scorsese et Quentin Tarantino tournent délibérément des scènes supplémentaires, bien plus violentes. Histoire de satisfaire les attentes de la Cara et de se montrer conciliant en proposant de les couper eux-mêmes.

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