Qu’y a-t-il sous l’étiquette du label bio ?
C’est le plus souvent aux lettres AB que les consommateurs français repèrent les produits bio. Pourtant ce symbole est en réalité une simple survivance : depuis 2009, c’est un cahier des charges européen, assorti d’un autre logo (une feuille étoilée sur fond vert), qui définit les normes appliquées en agriculture bio et s’impose à tous les pays de l’
Des contrôles annuels
Pour obtenir ce label européen, les producteurs et les transformateurs français doivent s’inscrire auprès de l’Agence Bio1 puis passer une convention avec l’un des neuf organismes certificateurs reconnus (voir encadré), appelés à contrôler le respect du cahier des charges. Ces organismes doivent visiter les opérateurs certifiés2 chaque année sur rendez-vous. Ils examinent leur comptabilité pour suivre les achats d’intrants, puis visitent la parcelle pour étudier sa conformité. Mais ils n’effectuent pas de prélèvement sur les produits à cette occasion.
4 235 sanctions ont été prises en 2015 pour 65 891 contrôles réalisés, selon l’Inao
L’Institut national de l’origine et de la qualité (Inao), qui habilite ces organismes certificateurs, exige d’eux qu’ils complètent ces contrôles annuels par un
Cette même année, 4 235 sanctions (pour 65 891 contrôles réalisés), allant du
Un niveau d’exigences plus élevé
Un certain nombre d’acteurs considèrent la
Demeter, qui promeut la biodynamie4 et regroupe près de 400 vignerons en France, proscrit par exemple une trentaine de produits autorisés par l’Union pour la vinification en bio. Bio Cohérence (300 adhérents), née en 2009 sous l’impulsion de la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab), requiert entre autres choses la déclaration de toute
Les organismes certificateurs ne sont autorisés à certifier que le label officiel
En matière de contrôle, ces marques privées forment certains des neuf organismes certificateurs (OC) à leurs propres cahiers des charges afin qu’ils visitent aussi leurs adhérents. Mais s’ils peuvent inspecter des standards privés en plus du label officiel, les organismes certificateurs ne sont autorisés à certifier que ce dernier. Ils doivent donc transmettre leur rapport de visite au détenteur de la marque privée, qui décide alors d’attribuer ou non sa mention.
De son côté, Nature & Progrès, pionnier du bio en France, né en 1964, n’oblige pas son millier de producteurs adhérents à se doter du label officiel. La moitié le font cependant, en partie pour accéder aux subventions européennes qui y sont attachées. Les porteurs du standard Nature & Progrès insistent sur les notions d’horizontalité et d’échange entre producteurs et consommateurs. Le contrôle et l’attribution de la mention passent par un « système participatif de garanties » : un binôme professionnel-consommateur, formé au cahier des charges et nommé par une commission locale (elle-même composée de professionnels et de consommateurs), visite les agriculteurs et remplit un rapport d’enquête, transmis in fine au service de gestion de la mention composé de salariés de Nature & Progrès.
N’y a-t-il pas là un risque de partialité ou d’entre-soi ? Eliane Anglaret, présidente de Nature & Progrès, assure pourtant que ce processus, qui partage les rôles entre différentes instances du mouvement, permet d’éviter les « copinages ». Le
Le risque d’une certification allégée
Une proposition de nouveau règlement européen, présentée par la Commission de Bruxelles en 2014 puis amendée par le Parlement et le Conseil européens, est aujourd’hui sur la table. Parmi les points d’achoppement, ce projet remet en cause l’obligation de contrôles annuels. La fréquence des visites serait adaptée désormais en fonction d’une analyse de risques réalisée par les organismes certificateurs.
Les acteurs de la filière redoutent que ces assouplissements entraînent une baisse de crédibilité, voire de qualité
Un changement qui n’est souhaité ni par les instances officielles françaises ni par les agriculteurs et la Fnab : pour eux, la périodicité annuelle des contrôles est un gage de crédibilité vis-à-vis du public. De plus, ce rythme correspond aux cycles de production.
Autre point de blocage : le projet européen prévoit aussi une décertification en cas de contamination fortuite par des pesticides. Vu la part de l’agriculture bio rapportée à l’agriculture conventionnelle, les acteurs français préféreraient en effet conserver l’obligation de moyens actuelle, qui ne pénalise pas les producteurs en cas de contamination mais les oblige à s’en prémunir. Le maintien de l’interdiction de l’agriculture hors sol est également en débat.
Les acteurs de la
- 1. Agence Bio regroupe notamment les ministères de l’Agriculture et de l’Environnement et des syndicats du bio.
- 2. Terme générique regroupant les producteurs, les transformateurs et les distributeurs.
- 3. La mention Bio Partenaire regroupe depuis 2015 les mentions Bio Solidaire et Bio Equitable, soit 43 filières bio et équitables. Elle leur demande de s’engager dans la durée pour assurer un revenu décent aux producteurs.
- 4. La biodynamie s’appuie notamment sur le rythme biologique des plantes pour les cultiver. En plus des viticulteurs, la mention regroupe en France 180 producteurs et 113 distributeurs et transformateurs.