Graphorama

Le retour programmé de l’austérité en Europe et 3 autres infographies à ne pas rater

6 min

Chaque semaine, Alternatives Economiques sélectionne pour vous quatre graphiques qui éclairent différemment l’actualité. Au menu de ce nouveau graphorama : les préconisations de la Commission européenne pour serrer la vis budgétaire, les postes vacants à l’Education nationale, le rôle des profits dans l’inflation et le revirement de politique monétaire en Turquie.

Chaque semaine, Alternatives Economiques sélectionne pour vous quatre graphiques qui éclairent différemment l’actualité. Au menu de ce nouveau graphorama : les préconisations de la Commission européenne pour serrer la vis budgétaire, les postes vacants à l’Education nationale, le rôle des profits dans l’inflation et le revirement de politique monétaire en Turquie.

1/ En Europe, 22 Etats sur 27 vont devoir se serrer la ceinture

Déjà obsolètes depuis plus de dix ans, les règles budgétaires européennes ont volé en éclat avec la pandémie, en 2020. Suspendues depuis, elles doivent entrer de nouveau en vigueur l’année prochaine, sous une autre forme.

La Commission européenne a fait une proposition législative en ce sens en avril. Elle est en cours de négociation avec le Parlement et le Conseil – qui réunit les chefs d’Etat et de gouvernement. On a toutefois déjà un aperçu de sa logique générale : les 3 % de déficit budgétaire et les 60 % de dette publique ne sont plus des totems à ne pas dépasser, mais gardent une importance malgré tout.

Concrètement, les Etats dont le déficit dépasse 3 % et/ou la dette dépasse 60 % vont devoir élaborer avec la Commission un plan sur plusieurs années (quatre ans, voire sept à certaines conditions) pour revenir vers ces valeurs cibles. Les recommandations par pays, établies mi-juin par la Commission européenne, et qui doivent être adoptées cette semaine par les chefs d’Etat et de gouvernement, montrent que l’effort demandé est important.

Les 14 pays ayant un déficit supérieur à 3 % en 2022 sont invités à réduire leur déficit de 0,5 % de produit intérieur brut (PIB) chaque année, voire de 0,7 % pour quatre pays, dont la France. Pour huit autres, l’effort est de 0,3 %, a listé l’association Greentervention qui s’interroge, dans ces conditions, sur la possibilité de conduire efficacement et rapidement leur transition climatique. La confédération européenne des syndicats dénonce, de son côté, l’absence d’un traitement spécial pour certains investissements publics qui permettrait de maintenir la capacité des gouvernements à réaliser des investissements aussi bien verts que sociaux.

Aude Martin

 

2/ A la rentrée 2023, le manque d’enseignants risque à nouveau de se faire sentir

1 264 sur 8 177. C’est le nombre de postes de professeur des écoles qui restent vacants à l’issue des résultats du concours 2023. Loin d’être un phénomène réparti équitablement sur le territoire, le manque d’enseignants se concentre dans trois académies : Versailles, Créteil et la Guyane, avec respectivement 578, 561 et 115 postes non pourvus.

En Guyane, où le territoire souffre du manque d’attractivité de ses infrastructures et des conditions de vie, à peine 30 % des postes ont été pourvus. Créteil et Versailles, quant à elles, représentent à elles deux près d’un tiers des ouvertures de postes. Elles font bien partie des académies les moins attractives, mais il faut surtout voir dans leurs difficultés à recruter un aperçu de la situation que pourrait connaître la France entière à l’avenir.

Certes, le déficit de postes est plus faible qu’en 2022, mais il reste trois fois plus élevé qu’en 2021. En cause, la réforme – portée par l’ex-ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer – exigeant des candidats qu’ils soient titulaires d’un master 2 pour pouvoir se présenter au concours, qui fait baisser le nombre de candidatures. Si le recrutement de candidats admis sur liste complémentaire a été lancé, il ne suffira pas pour combler tous les besoins, forçant une fois de plus les académies à faire appel à des vacataires.

Caroline Chambon

 

3/ La hausse des profits booste l’inflation en zone euro

Ce n’est désormais plus un scoop : l’inflation est tirée par la hausse des profits. Cette semaine, c’est le Fonds monétaire international qui le dit très clairement : en zone euro, les profits sont responsables de quasiment la moitié de la hausse des prix depuis début 2022. Cela signifie que les entreprises, en moyenne, ont augmenté leurs prix plus que n’ont crû leurs coûts.

A 10 % lors de son pic d’octobre 2022, l’inflation en zone euro tourne autour de 6 % depuis le début de l’année. En janvier, dernier mois pris en compte par l’institution, les profits contribuaient à l’inflation à hauteur de 3,5 points, contre 2,2 pour le coût du travail, et 1,4 pour les prix des importations, dans un contexte de diminution du prix des matières premières.

« Après avoir vu leurs salaires chuter de 5 % en 2022, les travailleurs font maintenant pression pour des augmentations », note le Fonds, qui s’interroge sur les conséquences en termes d’inflation. Va-t-elle augmenter encore plus fort si ces revendications sont suivies ?

Oui, rétorquent ceux qui croient en l’existence d’une boucle prix-salaires, malgré les conclusions inverses tirées notamment par le FMI, et qui aimeraient ainsi convaincre les salariés de se serrer la ceinture. Non, estime donc de son côté le FMI. Les entreprises pourraient absorber une hausse nominale des salaires de 4,5 % en ramenant simplement leur taux de profits à leur niveau pré-pandémie, a estimé le Fonds il y a quelques jours. Ce qui laisse une marge pour rééquilibrer la balance.

Aude Martin

 

3/ Virage à 180° pour la politique monétaire turque

La Banque centrale turque opère un brusque revirement. Après des mois de baisse du taux directeur, elle a décidé de presque le doubler, le faisant passer de 8,5 % à 15 %.

L’institution retourne ainsi à une politique plus classique de resserrement monétaire pour lutter contre l’inflation. Depuis deux ans, le très puissant président turc, Recep Tayyip Erdogan, avait imposé des mesures économiques pour le moins peu conventionnelles. Alors que l’inflation galopait à toute allure, la Banque centrale continuait d’abaisser le taux directeur, à rebours des préconisations en la matière (et de ce qui est fait actuellement dans la zone euro par exemple).

Les résultats n’étaient pas vraiment satisfaisants : le taux d’inflation a tutoyé puis dépassé les 80% lors du deuxième semestre 2022. Il est depuis un peu redescendu mais reste élevé, autour de 40 %.

Depuis sa réélection le 28 mai, Erdogan a montré des signes d’un retour à l’orthodoxie monétaire, en nommant à la tête de la Banque centrale Hafize Gaye Erkan, diplômée de Harvard et ancienne de Goldman Sachs. Tout aussi libéral, Mehmet Simsek a été désigné ministre des Finances.

Ils ont une la lourde tâche de relever l’économie du pays, qui souffre d’une dévalorisation de sa monnaie, d’une fuite des investisseurs et d’une hausse démentielle des loyers, qui écrabouillent le porte-monnaie des Turcs.

Eva Moysan

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Commentaires (1)
PIERRE SAINT MARTIN 31/07/2023
Dans le contexte inflationniste, il y a aussi le prix de l'énergie supporté par les entreprises. Comment est-il pris en compte ?
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