De la Belle Epoque aux Années folles, Cappiello : l’image qui frappe
Rompant avec tout réalisme, un nouveau langage propre à l'affiche publicitaire est inventé : l'image doit frapper pour imposer une marque.
Il ouvre ainsi la voie aux affichistes de l'entre-deux-guerres.
Leonetto Cappiello est le pionnier de cette nouvelle orientation. Cet Italien, né à Livourne en 1875, est un autodidacte. Il se lance tout d’abord dans la caricature, en Toscane puis à Paris, où il s’installe à partir de 1898. Il s’intéresse à l’affiche et signe en 1900 son premier contrat avec l’éditeur et imprimeur d’affiches Vercasson. Ce dernier s’attache un certain nombre d’artistes auxquels il procure un travail régulier, grâce à son importante clientèle : il joue le rôle d’agent publicitaire, d’intermédiaire entre l’artiste et l’annonceur.
Une créativité exubérante et gaie
Loin d’un quelconque réalisme, l’inventivité de Cappiello est totale. Sa créativité exubérante et pleine d’humour met en scène des personnages imaginaires, des bouffons débordant de vitalité, inspirés de la commedia dell’arte de son Italie natale, des Pierrots sortis du cirque, des personnages orientaux et des animaux fantastiques. Et peu importe que le sujet dessiné n’ait aucun rapport avec le produit vanté ! Dans sa célèbre affiche de 1903 pour le chocolat Klaus - une châtelaine en habit vert sur un cheval rouge -, nulle allusion au chocolat ! L’essentiel pour lui est que son affiche interroge et s’impose au passant.
Cette efficacité repose sur une analyse de la lisibilité de l’affiche : les couleurs très vives qu’il " faut faire crier entre elles ", le graphisme simplifié, la composition dynamique. Ces moyens servent deux préoccupations essentielles que l’artiste souligne dès 1907 dans un article de la Publicité moderne : par " la recherche de la tache (...), ne jamais être en harmonie avec ce qui l’entoure, mais en complète opposition, [et par] la forme de l’arabesque qui attire. " Pour cela, il utilise une technique acquise dans son travail de caricaturiste.
La grande économie de moyens impose la griffe Cappiello. Imité, il sera la référence pour les grands affichistes de l’entre-deux-guerres et fera, sous leur influence, évoluer son style à partir des années 20. Il s’approchera de ce que Carlu appelle " l’expression graphique de l’idée ". Finies les représentations de Pierrots et de lutins malicieux, c’est le caractère du produit vanté qui doit trouver une expression graphique claire.
En 1936, Cappiello, en contrat avec l’éditeur Devambez depuis 1919, signe avec Damour. Il participe à de nombreuses expositions internationales, notamment celle de 1937 dont il décore le pavillon de la publicité.
Artiste le plus productif de l’histoire de l’affiche (3 000 créations), Cappiello a vanté essentiellement des produits de consommation courante : produits alimentaires, dont de très nombreux alcools, mais aussi quelques produits industriels (automobiles Peugeot). Reconnu par le public comme par ses pairs, il meurt en 1942.