Hydrogène : découverte capitale ?

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Coûteux à extraire, difficile à stocker, l'hydrogène n'est pas près de remplacer le pétrole. A moins que...

Il y a dix ans, l’essayiste américain Jeremy Rifkin 1 avait créé l’effervescence en pronostiquant l’avènement d’une révolution économique grâce à la substitution de l’hydrogène aux hydrocarbures. Le soufflé était ensuite un peu retombé au vu des nombreux défis soulevés par la production et l’usage de l’hydrogène. De nouvelles avancées pourraient cependant sensiblement changer la donne.

Atouts et inconvénients

L’hydrogène a beaucoup d’atouts : c’est un gaz que l’on trouve en abondance sur Terre, souvent combiné à d’autres atomes, notamment dans l’eau, le pétrole ou le gaz naturel. Utilisé aujourd’hui surtout dans la chimie et le raffinage de produits pétroliers, il pourrait prendre une place prépondérante dans le système énergétique aussi bien pour produire de l’électricité, chauffer des bâtiments, propulser des véhicules ou faire fonctionner la batterie d’un téléphone portable. Surtout, sa combustion ne dégage aucun gaz à effet de serre, uniquement de la vapeur d’eau. Il présente cependant un (gros) inconvénient : il n’est pas disponible à l’état naturel, du moins le croyait-on jusqu’ici. Il faut donc casser des molécules de gaz ou d’eau pour l’isoler. Or, s’il est produit à partir de gaz, l’opération dégage du gaz carbonique. L’obtenir à partir d’une électrolyse de l’eau nécessite de l’électricité, qui majoritairement pour l’heure reste produite à partir de ressources fossiles (pétrole, nucléaire). Au total, le processus est peu compétitif et le rendement énergétique plutôt faible.

Autres défis posés par l’hydrogène son stockage plutôt risqué, en particulier dans un véhicule. Quant aux piles à combustible, utilisées pour convertir l’hydrogène en électricité, elles sont pour l’heure encore trop coûteuses et utilisent une grande quantité de platine. La donne semble cependant changer. D’abord, la recherche sur les piles à combustible progresse. Ainsi, la start-up israélienne CellEra s’est fait connaître récemment pour son invention d’une pile à combustible "révolutionnaire" sans platine. En 2014, une expérience grandeur nature devrait par ailleurs être menée en Europe du Nord : une flotte d’une centaine de voitures fonctionnant avec une pile à combustible sillonnera les routes du Royaume-Uni, d’Allemagne et de Belgique afin d’observer le comportement et le vieillissement de cette technologie in situ. Enfin, les constructeurs passent à la vitesse supérieure : en janvier dernier, Toyota et BMW ont annoncé un partenariat pour développer une voiture roulant à l’hydrogène d’ici à 2020, quelques jours avant que Nissan, Daimler et Ford ne fassent part d’un accord similaire avec un objectif fixé à 2017.

Ce qui pourrait s’avérer révolutionnaire, c’est cependant la découverte de sources naturelles d’hydrogène. On avait déjà observé d’importants dégagements d’hydrogène le long des chaînes volcaniques sous-marines. Mais en raison de leur profondeur, leur exploitation était exclue. Deux chercheurs de l’IFP Energies nouvelles (Ifpen) ont toutefois vérifié une observation russe : l’existence de flux terrestres localement importants, notamment dans les zones les plus anciennes situées au coeur des continents : les cratons précambriens 2. Certains sites abritent ainsi dans leur sous-sol des concentrations élevées d’hydrogène, qui pourraient être le fruit d’un dégazage en continu de la planète. Si le caractère durable de cette ressource se confirmait et si son exploitation était possible sur les plans technique et économique, la lutte contre le réchauffement climatique ferait un pas de géant.

  • 1. Voir "Il est urgent de sortir du pétrole", entretien avec Jeremy Rifkin, Alternatives Economiques n° 210, janvier 2003, disponible dans nos archives en ligne.
  • 2. www.ifpenergiesnouvelles.fr

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